N. Laneyrie-Dagen - faire revivre les artistes

Un jour, un confrère l’a même qualifiée d’« anthropologue ». Cette fois, c’est elle-même qui le formule, dans un entretien qu’elle a réalisé avec Francesco Melzi, élève de Vinci (Léonard de Vinci, Posthumes). Un échange imaginaire dans lequel elle explique son approche d’historienne qui consiste à « combler les interstices ». Car les faits « ne disent rien si on ne les fait pas parler ». Après tout, « Léonard a été un être de chair : il a eu un squelette qui dut le faire souffrir, passé soixante ans ; des cheveux qui tombèrent, peut-être des maux de dents. » Ainsi Nadeije Laneyrie-Dagen prétend bien mieux que faire de l’histoire, elle entend faire revivre les créateurs : « Si vous n’abordez pas l’histoire en critique d’art, vous tuez définitivement les artistes », explique-t-elle.

À l’historien de savoir critiquer telle œuvre ou tel peintre ancien, et de se souvenir que les artistes ont eu un corps et une âme. « L’érudition seule n’a pas de sens. Il faut comprendre comment vivaient les artistes. Qui ose dire que Poussin a eu la chaude-pisse et que c’est à cette période terrible qu’il a peint son plus bel autoportrait ? » Cette approche, l’historienne la doit à son quotidien qu’elle partage avec le critique d’art du Monde et au compagnonnage de ses amis artistes : Raysse, Pencréac’h, Levasseur, Reymond… « Je ne pratique pas l’anachronisme, j’essaye de comprendre ce qui se passe dans les ateliers pour comprendre ce qui a pu se passer chez Dürer. » Une hérésie salvatrice.