Brafa bien plus qu’un salon, une institution !

Par Marie Potard · L'ŒIL

Le 22 janvier 2015 - 829 mots

La Brussels Art Fair est l’une des plus anciennes foires d’antiquaires au monde. Toujours vaillante, elle souffle cette année ses soixante bougies. Les clefs de son succès ? Son éclectisme et sa convivialité.

« Une foire qui a 60 ans, c’est une foire qui se remet en cause chaque année. Néanmoins, il est difficile de modifier un cocktail gagnant », se plaît à dire Harold t’Kint de Roodenbeke, le galeriste qui est aux commandes de l’événement depuis trois ans. « Soixante éditions, cela reste exceptionnel dans le monde des foires d’art, je n’en connais d’ailleurs pas d’autres qui puissent se targuer d’une telle longévité », poursuit-il. Au fil des ans, Brafa s’est donc imposée comme un rendez-vous incontournable. Plus conviviale et intimiste que la Tefaf qui a lieu en mars à Maastricht, la foire belge est aussi plus accessible que la Biennale des antiquaires de Paris ; elle n’en est pas moins d’un très haut niveau de qualité. L’événement, qui se tient traditionnellement au mois de janvier, relance le marché de l’art après la trêve des confiseurs et donne le tempo pour l’année à venir, même s’il n’est pas évident de déplacer les foules à Bruxelles en cette saison. Mais, preuve de son succès, la foire est passée en l’espace de quelques années de 38 000 à 48 000 visiteurs en 2013, à 55 000 en 2014, un record !

Une foire de plus en plus tournée vers le culturel
C’est en 1956, six ans avant la création de la Biennale des antiquaires de Paris (1962), que la Chambre des antiquaires de Belgique fonde la « Foire des antiquaires de Belgique ». Jusqu’en 1966, elle se tient dans la salle Arlequin de la Galerie Louise mais, devant le succès grandissant de l’événement, celui-ci migre au Palais des beaux-arts de Bruxelles. De ses débuts à 1994, seuls les marchands de nationalité belge, membres de la Chambre royale des antiquaires de Belgique, pouvaient y exposer : ils étaient alors 40 à 50 participants. Mais, en 1995, la foire s’ouvre aux marchands étrangers. La manifestation devient européenne avec près de 60 % d’exposants étrangers, environ douze nationalités représentées et une forte présence des marchands français. En 2015, ils sont 42 exposants français contre 50 belges, le reste faisant le voyage du Royaume-Uni, d’Allemagne, d’Italie, de Suisse… Trop à l’étroit, les exposants ont quitté en 2004 le Palais des beaux-arts pour s’installer sur le site plus excentré de Tour & Taxis, permettant ainsi à Brafa d’accueillir entre 120 et 130 marchands. Pour l’édition 2015, ils sont 126, fidèles au poste, dont quatre signent leur retour et douze sont des nouveaux venus.

Depuis 2007, Brafa développe davantage l’aspect culturel et expose de prestigieuses collections belges, comme, par exemple, les chefs-d’œuvre des Musées de la ville de Liège en 2010, les pièces phare de la collection de la Fondation Roi Baudouin 2012 ou la collection d’objets provenant du Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren l’an passé. Pour fêter les 60 ans de la grande dame cette année, la Fondation Roi Baudouin conçoit une exposition intitulée « Le collectionneur belge », constituée d’œuvres issues exclusivement de collections privées belges. Un autre pas a été franchi l’an passé avec la programmation de cycles de conférences tout au long de la durée du salon.

Portrait en creux du collectionneur belge
La spécificité de Brafa ? Son éclectisme. Il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses. Une vingtaine de spécialités y sont représentées, depuis l’Antiquité jusqu’au XXIe siècle : archéologie classique et précolombienne, arts premiers, tableaux anciens, modernes et contemporains, sculptures et objets d’art, mobilier, céramique, œuvres sur papier, BD, arts asiatiques, orfèvrerie, tapis et tapisserie, joaillerie, livres anciens… Cet éclectisme trouve son écho dans l’agencement des stands, les spécialités étant totalement mélangées et non catégorisées, ce qui fait que le visiteur s’y promène comme dans le salon d’un collectionneur. Quelques points forts ressortent cependant parmi les disciplines exposées, comme les arts premiers, qui réunissent pas moins de dix marchands cette année, ou bien encore l’archéologie qui concentre une partie des meilleurs marchands au monde, comme la galerie Harmakhis (Bruxelles), Chenel (Paris) ou Phoenix Ancient Art (Genève).
« Le point commun à tous les amateurs qui se rendent à Brafa, c’est l’éclectisme. L’amateur d’aujourd’hui s’intéresse à tous les domaines », note Didier Claes, marchand d’arts premiers. Quant au profil type du collectionneur, « il est de plus en plus jeune, autour de 40-50 ans et vient plutôt du milieu de la finance, qu’il soit belge ou français exilé à Bruxelles. Il n’y a plus de professions libérales », poursuit-il. Harold t’Kint de Roodenbeke affine ce portrait du collectionneur belge qui visite la foire : « Il a la réputation d’être cultivé et pointu dans ses choix. Il est érudit, c’est un connaisseur. Un cartel incomplet ne le reste jamais bien longtemps ! Peu spéculateur, ou du moins pas comme dans l’art contemporain, il a cependant une vision dynamique de la collection : il ne va pas hésiter à vendre une pièce pour en racheter une plus qualitative pour faire progresser sa collection. »

Brafa

Du 24 janvier au 1er février. Tour&Taxis, avenue du Port 86C, Bruxelles (Belgique). Ouvert tous les jours de 11 h à 19 h. Nocturne le jeudi 29 janvier jusqu’à 22 h. Tarifs : 20 et 10€. www.brafa.be

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°676 du 1 février 2015, avec le titre suivant : Brafa bien plus qu’un salon, une institution !

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