Verres à soi

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 21 janvier 2015 - 399 mots

ARTS DE LA TABLE - Rares sont aujourd’hui les aventures originales dans le domaine du verre, en particulier du verre soufflé et du cristal taillé à la main. J. Hill’s Standard en est une.

Née à Waterford, en Irlande, cette société tient son nom d’un certain John Hill, alchimiste et inventeur, réputé avoir, au XVIIIe siècle, révolutionné la production du cristal taillé irlandais et carrément initié un nouveau standard de qualité et de perfection dudit matériau. « Nous avons voulu retravailler le cristal taillé à la main pour un public contemporain, indique Anike Tyrrell, fondatrice de la firme J. Hill’s Standard. Notre but est de sortir ce matériau des vitrines poussiéreuses pour l’emmener vers des contrées totalement nouvelles. Nous sommes déterminés à changer la perception qu’ont les gens du cristal taillé, en créant des produits non seulement authentiques et désirables, mais aussi beaux et… utilisables. » L’entreprise vient ainsi de lancer deux collections inaugurales de haute volée : d’un côté, la ligne Elements par les Néerlandais Stefan Scholten et Carole Baijings ; de l’autre, la gamme Cuttings du designer italien Martino Gamper. Ces deux ensembles réunissent des verres multi-usages – droits ou à pied, à eau, à vin, à bière, à whisky ou à champagne –, ainsi que des carafes.

Fidèles à leurs recherches très géométriques, Scholten et Baijings ont développé et mixé différents motifs de taille, allant même jusqu’à les faire se télescoper. « Cette collection se définit par un riche assemblage de signes graphiques et de tons opaques, explique Stefan Scholten. Des textures et des tailles de différentes profondeurs et intensités sont utilisées pour créer un paysage de motifs superposés qui sont rafraîchissants et séduisants. » La ligne s’avère très dessinée, maîtrisée dans les moindres détails.A contrario, la série conçue par Martino Gamper semble, elle, avoir été réalisée de manière davantage intuitive.

La surface du cristal arbore des marques appuyées, taillées avec assurance. Avec cette méthode de taille, nous sommes plus proche de la sculpture, que de la décoration appliquée sur un matériau. « Mon approche de la technique révèle le potentiel du processus de taille, précise Martino Gamper. Les verres arborent des tailles profondes et expressives au-delà de l’habituelle surface décorative. » Les formes apparaissent, ici, presque « rabotées », rudes et primitives dans la main. Les doigts recherchent alors naturellement les cavités lisses ou les arêtes nettes des coupes. Le cristal
se fait alors tactile.

À savoir
La région de Waterford, au sud de l’Irlande, fut jadis un centre important de la taille du cristal, avec quelque 120 fours et 3 500 artisans. Il ne reste aujourd’hui qu’une poignée d’ateliers, dont les deux maîtres-artisans verriers, Walter Walsh et Frankie Power, qui taillent le cristal pour J. Hill’s Standard. Le verre soufflé, lui, est réalisé en République tchèque.

À voir
Stefan Scholten (1972) et Carole Baijings (1973) ont ouvert leur agence, en 2000, à Amsterdam (www.scholtenbaijings.com). Né à Merano, en Italie, en 1971, Martino Gamper, lui, a choisi de s’installer à Londres (www.martinogamper.com).

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°676 du 1 février 2015, avec le titre suivant : Verres à soi

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