Pierre-Simon Jaillot, Saint Sébastien

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 16 décembre 2014 - 392 mots

L’entrée au Louvre d’un ivoire français du XVIIe siècle est un événement. La statuette préemptée, exceptionnellement signée et datée, documente une production fort méconnue.

Saint Sébastien
Sébastien, né à Narbonne, aurait vécu au IIIe siècle selon La Légende dorée qui relate son martyre. Ses guérisons miraculeuses avaient entraîné un élan massif de conversions que Dioclétien stoppa net en ordonnant sa mise à mort. Le zélateur de la foi chrétienne est conduit au Champs de Mars où l’attendent les archers de l’empereur. Le sculpteur Jaillot n’oublie pas de représenter le poteau d’exécution qui lui sert à stabiliser la statuette mais choisit de ne pas représenter les flèches du martyre. Une omission qui tempère la douleur qui secoue habituellement le corps supplicié. Seul un souffle s’échappe de la bouche, comme une ultime offrande adressée au Seigneur. Malgré sa religiosité, l’œuvre n’est pas que dévotionnelle. Son anatomie trahit l’effort de Jaillot de se conformer au canon académique dicté par l’institution qui venait de l’accueillir.

Ivoire

La sculpture française en ivoire aux XVIIe et XVIIIe siècles reste une énigme. Elle se contente de noms souvent sans œuvre et de nombreuses œuvres sans signature. La découverte d’une statuette attribuée de façon certaine à Pierre-Simon Jaillot constitue donc un événement en soi et porte à sept le nombre d’œuvres identifiées de sa main.

9 000 €

C’est le prix d’adjudication sans les frais de ce lot phare de la vente aux enchères dijonnaise du 11 octobre dernier à l’hôtel des ventes Victor Hugo. Une affaire pour le musée qui a usé de son droit de préemption pour l’emporter en dessous de l’estimation (15 000 à 20 000 €).

1662

Rares sont les ivoires datés et signés. La statuette du Louvre est à ce titre un document précieux de comparaison avec le Calvaire du même auteur conservé au Victoria & Albert Museum (Londres).
Un chef-d’œuvre de deux ans postérieur.

Jaillot
Des frères Jaillot, seul l’aîné, Pierre-Simon, fit carrière dans l’ivoirerie. Hubert, le cadet, devint géographe de Louis XV. Né en 1631, à Saint-Claude, le Jurassien est le premier sculpteur ivoirier à faire son entrée à l’Académie royale en 1661 avant d’en être brutalement congédié, suite à sa querelle avec Charles Le Brun. En représailles, le Premier Peintre envoie Jaillot séjourner à la Bastille et transfère son morceau de réception des collections de l’Académie aux Petites-Maisons, l’hôpital psychiatrique de l’époque.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°675 du 1 janvier 2015, avec le titre suivant : Pierre-Simon Jaillot, Saint Sébastien

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