Les vitamines du bonheur

En particulier celles spécialement pénétrantes de Claude Batho (1935-1981) et de Dolorès Marat (1944), touchantes par la poétique de leur regard et le temps suspendu de leurs images. Dans l’univers de Dolorès Marat, les couleurs sont veloutées, la solitude des êtres, une constance lumineuse, la lumière, choisie de préférence loin du jour éclatant, et les repères spatiaux et temporaux sont brouillés – Paris pourrait être New York et inversement, le bateau de touriste des chutes du Niagara, un navire en pleine tempête. L’intériorité des images noir et blanc de Claude Batho résonne quant à elles de la voix d’une femme qui a enregistré son univers familial, domestique avant sa disparition. Des pommes de terre épluchées dans un évier, des poireaux dans un saladier, une lessive de linge lavé ou une éponge au bord d’une mémoire : l’anodin devient marquant, beau, vulnérable. Vulnérabilité qui, dans la série inédite d’autoportraits, de paysages et d’intérieur de When Water Comes Together with Other Water de la jeune Claire Laude, évoque, là encore, un temps suspendu, celui du corps, de la nature et des espaces intérieurs occupés. Trois morceaux de choix parmi la petite cinquantaine de photographes exposés, où dominent aussi les fragments d’instants harmonieux vécus en voyage par Bernard Descamps et les Parasols de John Batho, aux couleurs qui ne sont pas sans faire penser, bien qu’étrangères à elles, aux études sur la couleur de Josef Albers.