Françoise Vergier

L’Ydée du tableau

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 23 juin 2014 - 408 mots

Une œuvre des plus singulières vient d’entrer au Musée d’art moderne
et contemporain de Villeneuve-d’Ascq. Une acquisition hommage à l’un des soutiens historiques du LaM.

Dominique Bozo
Sans Dominique Bozo (1935-1993), le parc de sculptures qui entoure le LaM ne compterait pas les Picasso, Lipchitz et Calder monumentaux qui font aujourd’hui sa renommée. Son soutien fut essentiel afin d’obtenir ces dépôts prestigieux du Musée national d’art moderne dont il était le directeur. Généreux, Dominique Bozo le fut encore à son décès en léguant au musée sa bibliothèque riche de livres d’artistes dédicacés, de dessins et de lithographies des années 1960-1990.

1989
Dernier « ventre » d’une série commencée dans les années 1980 par Françoise Vergier, qui poursuivait alors des recherches sur la fragmentation du corps féminin. Cette ultime version fut conçue spécialement pour Dominique Bozo, désolé de n’avoir pu en acquérir un exemplaire plus tôt.

La première lettre du titre fait référence à l’acte de naissance du tableau (la demande de D. Bozo), au chromosome masculin de son instigateur, mais aussi « au principe de deux choses qui tout à la fois se rejoignent ou se séparent selon qu’on le lit de bas en haut ou de haut en bas, dualité fondatrice pour l’artiste ».

9 000 €
Un prix préférentiel consenti par la galerie Claudine Papillon (Paris) et les descendants de Dominique Bozo qui souhaitaient, par ce geste, honorer l’action du conservateur, premier propriétaire de l’œuvre, qui fit beaucoup pour le rayonnement du LaM. Reconnaissante à son tour, la société des Amis du musée a pourvu à la totalité de la somme demandée.

Art singulier
De nature hybride, L’Ydée du tableau illustre la singularité même de l’œuvre de Françoise Vergier. Son support de bois massif, bombé, est recouvert d’une couche de peinture fixée sous verre. Des lames de rasoirs entaillent la surface abdominale privée ici de nombril. Le « reliquaire » est « à mi-chemin entre le raffinement le plus extrême et l’étrangeté la plus dérangeante ». Ce paradoxe n’est pas sans se référer au surréalisme d’une Meret Oppenheim ou d’un René Magritte présents sur les cimaises du LaM depuis la donation fondatrice de Jean et Geneviève Masurel. Ce « tableau sculpture » fait également écho à la collection d’art brut du musée en raison de sa nature résolument atypique. Son acquisition vient, en outre, compléter le fonds d’artistes femmes du LaM qui, avec Françoise Vergier, née en 1952, comble une lacune de la manière la plus originale et convaincante.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°670 du 1 juillet 2014, avec le titre suivant : L’Ydée du tableau

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