Prière d’insérer

Conversations (artistes et collectionneurs) - Nathalie Guiot

En l’absence d’esprit critique…

L'ŒIL

Le 20 février 2014 - 371 mots

« Cet ouvrage est une galerie de portraits. Il esquisse en creux, de manière subjective et non exhaustive, une typologie du collectionneur. »

Ou comment se défausser élégamment. Car, « Qui collectionne ? » Apparemment, seules les personnes fortunées, puisqu’aucun collectionneur aux revenus modestes n’est interviewé. Tout un pan du marché de l’art est ainsi nié dans cet ouvrage Conversations (artistes et collectionneurs) de Nathalie Guiot. Peut-être parce que, comme le dit la collectionneuse Hélène Lemoine, « un collectionneur qui ne rechercherait que des œuvres inconnues n’intéresserait pas l’opinion publique ni les lieux de médiatisation de l’art »

L’ouvrage recèle autant de citations qui font grincer des dents que des débuts de réflexion intelligente. Par exemple chez Michelangelo Pistoletto : « L’artiste ne peut être enfermé dans un système économique, comme je l’ai démontré, même si celui-ci existe. Il est crucial que mes œuvres soient dans des collections privées renommées et dans de grands musées » ! Et ailleurs : « Le musée d’art contemporain a un rôle essentiel : il expose des pièces uniques, et l’idée d’unicité, dans un monde où tout est multiplié, est essentielle. » Le meilleur comme le pire donc.

L’ouvrage a le mérite de donner la voix à des collectionneurs engagés telles Patrizia Sandretto Re Rebaudengo ou Sandra Mulliez : « Chez moi, sont exposées à la fois des œuvres d’artistes confirmés et des œuvres de très jeunes sortant des Beaux-Arts. Il faut avoir le courage d’assumer son regard pour acheter, nous n’avons pas seulement des oreilles, on peut acheter simplement parce qu’on aime, même si cela coûte très peu. » Heureusement, donc, que le débat autour du marché de l’art ne se limite pas au propos de Jeff Koons ! « Bien sûr, il y a la crise un peu partout dans le monde, je ne vis pas avec des œillères, mais en même temps, le niveau de vie augmente pour chacun », explique l’artiste. Si la majorité des interviews, dont celle de Sandra Mulliez et de Camille Henrot, sont percutantes, la forme même de l’interview collectionneur/artiste est la faiblesse de ce livre qui manque d’esprit critique.  Et l’on se demande parfois ce que l’apprend de plus  que ce que l’on ne savait pas déjà…

Conversations (artistes et collectionneurs) de Nathalie Guiot - éditions Black Jack, 232 p., 27 €

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°666 du 1 mars 2014, avec le titre suivant : Conversations (artistes et collectionneurs) - Nathalie Guiot

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