Plurielles, plurinationale, pluralité

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 19 novembre 2013 - 705 mots

Plurielles comme les « modernités » du nouvel accrochage réussi du Centre Pompidou. Courageusement, le Musée national d’art moderne réalise avec le quatrième accrochage thématique de ses collections permanentes une relecture critique de l’histoire de l’art de 1905 à 1970. Fini le récit progressiste et dominant de l’histoire de l’art occidental qui voit s’enchaîner seuls les mouvements européens d’avant-garde – le cubisme après le fauvisme, etc. –, place à une histoire globale de l’art qui prend en compte les « autres » modernités, celles d’Asie, d’Afrique, des Amériques latine et du Nord… « “Modernités plurielles” élargit ce principe à une relecture non plus thématique, mais générale et historique de l’histoire de l’art », écrit dans le catalogue Catherine Grenier, directrice adjointe du MNAM et grand ordonnateur de ce nouvel accrochage qui ajoute, par prudence : « Mais cette vision, dont les visiteurs doivent avoir conscience qu’elle est par nature partiale et conjoncturelle, n’a nullement la prétention de devenir canonique. » Pourtant, comment ne pourrait-elle pas devenir canonique en pleine mondialisation ? Quand les touristes du monde entier ont désormais le choix de ne plus venir à Paris ? Quand le Centre Pompidou regarde, comme nombre d’autres institutions, du côté de la générosité des mécènes et des donateurs des pays « émergents » ? Le monde a fondamentalement changé depuis la création des musées, la vision s’est déplacée. Parions que quand viendra l’heure du prochain accrochage des collections, les « modernités » du Centre Pompidou ne pourront que rester « plurielles ».


Plurinationale
Le monde de l’art aurait voulu faire une farce à Nathalie Kosciusko-Morizet, il ne s’y serait pas mieux pris. « Paris perd sa singularité sur le plan culturel. Il ne s’y passe plus grand-chose de nouveau ou d’original : elle fascine moins, elle n’étonne plus », déclarait le 24 octobre la candidate UMP à la mairie de Paris lors de sa conférence pour « Une autre politique culturelle ». Au même moment, pourtant, la foule se pressait dans les allées de la Fiac, où l’on constatait une présence accrue cette année des visiteurs étrangers, venus notamment des États-Unis et d’Amérique latine pour voir la Foire internationale d’art contemporain, mais aussi les nombreux autres événements de qualité, foires off et expositions (dont « Modernités plurielles »), organisés dans la capitale cet automne. « Welcome in Paris », lançaient le même jour les organisateurs du salon Outsider Art Fair à leurs collectionneurs étrangers. Ils étaient les bienvenus, en effet.


Pluralité La Fédération nationale de la presse spécialisée, à laquelle L’Œil est adhérent, tire la sonnette d’alarme. Le projet de loi de finances 2014, voté en première lecture à l’Assemblée nationale, acte la fin de la compensation du moratoire postal décidée par le gouvernement. Dit plus clairement : les tarifs postaux pour l’affranchissement des journaux et des magazines vont augmenter dès l’année prochaine. De combien ? De plus de 20 % pour les deux années à venir, ce qui, dans une économie fragile, représente une dépense brutale difficile à supporter. « Nul ne conteste la nécessité de la rigueur budgétaire », dit en substance la FNPS, qui dénonce des mesures « lourdes de conséquences » mais aussi « discriminatoires ». Car, dans le même temps, si le gouvernement privilégie la presse dite « d’information politique et générale » en lui octroyant des aides directes, il alloue également des fonds à des titres de presse de loisirs – dont des magazines de télévision – sans aucun critère défini. Bien sûr, L’Œil ne prétend pas faire partie de la presse d’information politique et générale, même s’il renvendique le fait d’informer ses lecteurs sur son secteur de spécialisation, l’art, sur des sujets de politique culturelle et d’économie. Madame la ministre de la Culture et de la Communication le sait bien, elle que nous avons longuement interviewée sur sa « politique générale » en octobre. Il ne s’agit donc pas, ici, de dénoncer les aides directes, ni même d’y prétendre. Il s’agit d’appeler à un débat citoyen pour définir, une fois pour toutes et dans la transparence, les critères d’attribution de ces aides directes et indirectes. Il est temps de rebattre les cartes pour aider la presse, toutes les presses. Au nom de votre droit à l’information spécialisée. Au nom du pluralisme.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°663 du 1 décembre 2013, avec le titre suivant : Plurielles, plurinationale, pluralité

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