Swamp Club, le monde de l’entre-deux

Pour sa nouvelle pièce présentée en juillet au Festival d’Avignon, Philippe Quesne, ex-plasticien désormais metteur en scène, installe la création en milieu humide. Au cœur d’un marais fumant et grouillant (swamp en anglais), d’où son titre Swamp Club. Un paysage entre deux mondes, deux états, le solide et le liquide, un lieu isolé abritant un centre d’art sur pilotis entièrement transparent – littéralement ouvert sur l’extérieur. Ses occupants, des ermites ultra-connectés, y coulent des heures paisibles, loin de la furie des villes, en compagnie d’un renard empaillé et d’un héron de pacotille. Avec pour curateur un vieux chaman mutique.
Comme dans un marais, ce qui semble végéter dissimule une vie intense, à la base de tout un écosystème, indispensable. Une énergie microscopique, et en apparence dérisoire mais opiniâtre, qu’un projet de construction urbaine tentera d’assécher. Le Swamp Club alangui devient alors un lieu de résistance, empli de musique, et son étrangeté se drape d’un voile politique.
Créé pour les dix ans de la compagnie de Philippe Quesne, Vivarium Studio – ce laboratoire d’expérimentations scéniques qui absorbe régulièrement de nouveaux interprètes, souvent issus de diverses disciplines –, Swamp Club est d’abord une atmosphère. Un univers nocturne, fantastique, mouvant, sur le fil du rêve comme dans les romans de l’écrivain norvégien Tarjei Vesaas. Mais encore une métaphore de la création, qui puise autant dans le conte que dans la réalité contemporaine, finalement beaucoup plus brutale et inquiétante que bien des histoires de fantômes.