Gloria Friedmann en état d’alerte

Fondation Maeght jusqu’au 16 juin 2013

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 27 mai 2013 - 330 mots

Le monde est un théâtre d’ombres, un théâtre dont les acteurs sont tantôt des animaux, tantôt des humains. On ne sait pas toujours distinguer les uns des autres.

On ne sait pas toujours qui singe qui. Qui, de la bête ou de l’homme, fut le premier sur Terre. Telles sont du moins les réflexions auxquelles nous entraîne l’œuvre de Gloria Friedmann dans le parcours qu’en propose Olivier Kaeppelin, le directeur de la Fondation Maeght.

Si une sculpture au titre des Inséparables (2008) nous y accueille sur le seuil, offrant à voir un singe tranquillement assis sur le crâne aplati d’une tête monumentale, ce n’est pas pour autant que tout est dit. Loin de là. La porte franchie, c’est celle d’une figure énigmatique, dite L’Intouchable (2007), toute trempée dans le plâtre blanc, tenant dans ses mains un long chapelet de clefs, qui ouvre l’exposition. Quel que soit le médium qu’elle utilise – dessin, peinture, sculpture, installation, photo, vidéo… –, l’œuvre de Gloria Friedmann balance ainsi entre évidence et mystère dans des jeux d’association d’images qui en engendrent d’inédites, tantôt mentales, tantôt poétiques, et qui instruisent chaque fois un dialogue inattendu sur la condition du vivant.

Qu’elle s’interroge sur les relations entre vie et mort, entre nature et culture, entre animalité et humanité, la démarche de l’artiste, née dans l’Allemagne de l’immédiat après-guerre, est nourrie de l’écho tant romantique d’un Friedrich que politique d’un Beuys. Où elle trouve son originalité, c’est dans une façon d’être au monde, à son écoute, toujours prompte et disponible à l’envisager dans la diversité des moyens qu’il lui offre. L’art de Gloria Friedmann ne respire aucune nostalgie, il est dans un flux permanent, celui de la vie. Dans une confrontation tour à tour émerveillée et inquiète de ce qui la fonde, de ce qui la porte, de ce qui la transforme. Aussi son œuvre est-elle en état d’alerte permanente. Comme la silhouette troublante de cet aigle noir qui plane en surface de l’une de ses récentes peintures. 

« Play-Back d’Eden. Gloria Friedmann »

Fondation Maeght, 623, chemin des Gardettes, Saint-Paul (06), www.fondation-maeght.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°658 du 1 juin 2013, avec le titre suivant : Gloria Friedmann en état d’alerte

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