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La renaissance des musées marseillais

Par Isabelle Manca · L'ŒIL

Le 18 janvier 2013 - 1092 mots

MARSEILLE

Musée d’histoire, palais Longchamp, château Borély… De nombreux musées auront dû attendre MP 2013 pour que soient modernisés leurs espaces et leur muséographie.

Parallèlement à l’ouverture de nouveaux musées, nés sous l’égide de Marseille-Provence 2013 capitale européenne de la culture, la Ville s’apprête à dévoiler un parc muséal rénové. Quatre des douze musées municipaux ont ainsi fait l’objet de travaux indispensables, qui ne figuraient étonnamment pas dans les engagements de la candidature de MP 2013, à l’exception de la réhabilitation du palais Longchamp. Un audit, révélé en 2009, dressait pourtant un constat inquiétant : « Le Musée d’histoire était totalement obsolète, le Musée Cantini présentait de graves problèmes de sécurité et le château Borély ainsi que le Musée des beaux-arts étaient fermés depuis plusieurs années. Cet état des lieux était incompatible avec notre statut de deuxième ville de France », résume Daniel Hermann, adjoint au maire, délégué à l’Action culturelle. « Après l’audit et dans l’optique de 2013, ces quatre chantiers ont finalement été lancés, pour un montant de 90 millions d’euros », précise l’élu.

De la mise aux normes à la refonte totale
Le vol très médiatisé d’un pastel de Degas en 2009 au Musée Cantini avait focalisé tous les regards sur les lacunes de sécurité dont souffrait l’établissement. Pour pouvoir à nouveau présenter sa collection d’art moderne et accueillir des expositions itinérantes, le musée a dû subir une remise aux normes complète de ses dispositifs de sécurité ainsi qu’une modernisation de ses conditions de conservation.

À quelques encablures de là, le Musée d’histoire achève quant à lui une renaissance spectaculaire. Construite hâtivement après la découverte fortuite des vestiges du port antique en 1967, cette institution trop peu valorisée était tombée en désuétude au point d’échapper in extremis à la destruction en 2009. « Nous sommes passés d’un musée de 2 500 à 6 500 m2, d’une muséographie vieillotte et illisible à une présentation moderne et interactive, permettant d’exposer quatre mille pièces racontant les 2 600 ans d’histoire de Marseille », se réjouit son directeur, Laurent Védrine. Une véritable mue, donc, pour ce musée entièrement repensé par l’architecte Roland Carta et servi par la scénographie limpide d’Adeline Rispal. Un nouvel écrin pour magnifier de passionnantes collections historiques et archéologiques, comprenant notamment d’impressionnants vestiges de bateaux antiques et des dépôts lapidaires d’époque paléochrétienne.

Autre lieu emblématique de la cité phocéenne, le palais Longchamp, qui abrite depuis le XIXe siècle le Musée des beaux-arts, a également bénéficié de travaux d’envergure. Symbole de Marseille, ce monument à la gloire des arts, dont la grande fontaine commémore l’arrivée des eaux de la Durance dans la ville, réclamait une lourde réhabilitation. Plusieurs années de travaux ont été nécessaires pour en restaurer les façades, les fontaines, la verrière zénithale, et en réaménager les espaces intérieurs afin de retrouver les volumes originels, auparavant grevés par une mezzanine récente. « Ce long chantier a été jalonné d’heureuses surprises, comme la redécouverte de la mosaïque de pavement dissimulée sous le béton et les couleurs d’origine des murs dont la restitution rend au musée le faste et l’esprit d’un palais des arts sous le Second Empire », souligne son conservateur, Luc Georget. Un cadre prestigieux pour une belle collection, allant du XVIe au XIXe siècle, et recelant quelques chefs-d’œuvre des écoles française et italienne.

Autre édifice historique fermé depuis près de dix ans, le château Borély a lui aussi fait l’objet d’une vaste campagne de restauration du bâti et de son décor intérieur signé Louis Chaix. « Ce chantier a sauvé de délicates gypseries, un important décor peint et des boiseries dorées qui consacrent le site comme l’une des rares bastides du XVIIIe siècle à avoir conservé l’intégralité de son programme architectural et décoratif », indique André Malrait, adjoint au maire au Patrimoine. Cette belle demeure bourgeoise s’apprête à accueillir un nouveau musée, centralisant différentes collections jusque-là dispersées : les arts décoratifs, la mode et la faïence. « Le résultat va au-delà de nos espérances puisque nous avons obtenu une restauration totale, un remeublement conséquent et un programme d’unification des collections qui donne corps à un projet très ambitieux et cohérent », se félicite Christine Germain, conservatrice au musée.

2013, le début d’une nouvelle ère ?
« L’ouverture de ce nouveau lieu participe aussi de la création d’un second pôle muséal à Marseille, où la majorité des équipements se concentrent en centre-ville », explique Daniel Hermann. Le château, excentré, se trouve effectivement à proximité du Musée d’art contemporain, souvent présenté comme le grand laissé-pour-compte de 2013. Plusieurs projets avaient en effet été étudiés pour accroître l’accessibilité et la visibilité du MAC, notamment le transfert de ses collections dans la Friche Belle de Mai. « Cette hypothèse n’a pas été retenue et ça a cristallisé les inquiétudes autour de l’avenir du MAC, dont les subventions avaient, par ailleurs, baissé au cours des années précédentes », explique son directeur, Thierry Ollat. « On a exagéré les difficultés du MAC ; car le projet de délocalisation, qui n’était pas une fin en soi puisque l’on envisage aussi d’agrandir nos locaux, a dissimulé une réalité plus contrastée. Malgré une situation financière difficile, nous maintenons une fréquentation stable grâce à une programmation exigeante. Mais surtout, il est excessif de laisser croire que notre tutelle nous a abandonnés, comme cela a beaucoup été dit, puisque la Ville a notamment investi dans la mise aux normes de la climatisation et dans la restauration des collections », estime ainsi le chef d’établissement.

Si l’échéance de 2013 a permis d’accélérer certains projets, elle n’a donc pas résolu tous les problèmes des musées de Marseille. « Il y a eu un déclic, une prise de conscience sur l’état et le potentiel des musées, confie un conservateur. Demain, de nombreux défis nous attendent pour faire vivre ces nouveaux outils : il va falloir sanctuariser nos budgets, mais surtout procéder à un aggiornamento de nos politiques d’accueil et à une amélioration des relations entre les différents services pour maintenir cette dynamique. » Dont acte !

Quelques expos MP 2013 du 1er semestre :

- « Méditerranées. Des grandes cités d’hier aux hommes d’aujourd’hui », au J1 à Marseille, jusqu’au 18 mai.

- « Ici, ailleurs », à la tour Panorama, Friche Belle de Mai à Marseille, jusqu’au au 7 avril.

- « Cadavres exquis, suites méditerranéennes », au Musée Granet à Aix-en-Provence, jusqu’au 13 avril.

- « Ulysses », itinéraire d’art contemporain sur tout le territoire de Marseille-Provence 2013 de janvier à décembre.

- « César et les secrets du Rhône », aux Archives et Bibliothèque départementales Gaston-Defferre à Marseille, jusqu’au 23 mars.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°654 du 1 février 2013, avec le titre suivant : La renaissance des musées marseillais

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