Art contemporain

Bâle (Suisse)

Les deux faces de Jean Tinguely

Musée Tinguely - Jusqu’au 30 septembre 2013

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 17 décembre 2012 - 499 mots

Le Musée Tinguely de Bâle n’a pas programmé de manifestation d’envergure sur l’artiste auquel il a emprunté son nom depuis son exposition inaugurale, en octobre 1996.

Il n’est pas resté pour autant inactif, au regard des plus de cinquante expositions qu’il a organisées autour d’un thème ou d’un artiste liés, de près ou de loin, à Jean Tinguely (1925-1991) : les voitures – il était un passionné de courses automobiles –, Arman, le mouvement, Rauschenberg, art et machines, etc. Ni si l’on considère les acquisitions qu’il a réalisées dans ce même laps de temps.

« Notre exposition de 1996 était constituée aux trois quarts de prêts. Aujourd’hui, nous montrons notre propre collection », exulte Roland Wetzel, le directeur du musée, qui peut se réjouir : « Tinguely@Tinguely » (tournure « branchée » pour signifier « Tinguely par Tinguely ») survole l’ensemble de la carrière de l’artiste, de ses Méta-Kandinsky ou Méta-Malevitch (des tableaux en relief en forme d’hommages animés) à son Pit-Stop, commande de la Régie Renault en 1984.

Il ne s’agit pas d’une rétrospective, où l’on pourrait relever des manques, mais d’un ensemble cohérent qui forme la collection bâloise, aujourd’hui composée des 52 sculptures données par Niki de Saint Phalle en 1992 et qui sont à l’origine du musée, complétées par une centaine d’autres sculptures, près de 1 400 œuvres sur papier et les archives de Pontus Hultén acquises en 2002. Bref, de quoi réaliser une exposition qui approche l’ensemble des recherches de l’artiste, ses centres d’intérêt et son moi le plus intime.

Ainsi du trublion clownesque dont les cliques défilant dans les rues de Bâle pour son carnaval ont marqué durablement l’œuvre. Dans le parcours, un film exhumé montre Tinguely paradant dans les rues de Paris, fanfare en tête, pour apporter ses œuvres à une exposition (dont la Machine à faire des sculptures de 1960) lorsqu’arrive… la police. Dans la même salle, le Frigo Duchamp de 1960, équipé d’une alarme qui se déclenche à l’ouverture de la porte, témoigne de l’esprit de dérision qui animait l’artiste, tout comme La Vittoria, cet immense pénis érigé à Milan en 1970 pour tirer un feu d’artifice et qui devait mettre « le feu » aux poudres (les pompiers ne se déplaceront pas pour éviter d’avoir à consigner cette provocation).

Mais toute pièce à son revers, et Jean Tinguely n’échappe pas à la règle. La machine-performance construite pour s’autodétruire dans les jardins du MoMA en 1960 (Hommage à New York) et son Étude pour une fin du monde, performance destructrice filmée dans le désert du Nevada en 1962, dévoilent un homme habité par l’angoisse, traumatisé par les bombardements de Bâle. Le 26 août 1986, lorsque la foudre s’abat sur la ferme de ses voisins à Neyruz en Suisse, il se remet tout juste d’un pontage coronarien qui a failli lui coûter la vie. Il récupérera les débris de l’incendie pour en faire sa Danse macabre Mengele présente dans l’exposition.

Voir « Tinguely@Tinguely »

Musée Tinguely, Paul Sacher-Anlage 2, Bâle (Suisse), www.tinguely.ch/fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°653 du 1 janvier 2013, avec le titre suivant : Les deux faces de Jean Tinguely

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