Monaco joue la carte de l’art

Par Anne-Cécile Sanchez · L'ŒIL

Le 14 septembre 2012 - 868 mots

Depuis cet été, Monaco dispose d’un tout nouveau port franc destiné à séduire le marché, signe de l’engagement de la principauté en direction de l’art.

Si au milieu des Porsche et des Ferrari le Sky Mirror d’Anish Kapoor (inauguré en 2007) reflète un ciel quasi immuablement bleu, il semblerait que la principauté souhaite renouveler son image de marque. « La princesse, qui préside nombre d’institutions comme le Nouveau musée national de Monaco, les Ballets de Monte-Carlo, l’Orchestre philarmonique et l’Opéra de Monte-Carlo, ainsi que la direction des Affaires culturelles, entend donner à travers la création contemporaine une image plus actuelle de la principauté », reconnaît Marie-Claude Beaud, nommée en avril 2009 directrice du Nouveau Musée national (NMNM).

Sur le Rocher, une programmation de poids-lourds
Bien qu’au cœur d’une période de disette budgétaire – rendue moins pénalisante pour le NMNM grâce à l’arrivée de deux partenaires, UBS SA pour le programme d’expositions et la Compagnie monégasque de banque pour les acquisitions –, Marie-Claude Beaud estime que le contexte n’a jamais été aussi favorable à un essor de l’art contemporain sur le Rocher.
Tandis que la galerie Art & Rapy accueille un Summer Show de sa consœur parisienne Air de Paris, à la galerie Sem-Art, les détournements de tableaux célèbres de l’artiste américain Titus Kaphar cèdent la place cette rentrée aux photographies de l’Iranienne Shirin Aliabadi. « En dehors des gens qui arrivent à la galerie par curiosité ou pour le restaurant, nous voyons surtout des collectionneurs internationaux », assure Safia El-Malqui, qui a ouvert la galerie Sem-Art il y a deux ans et qui se félicite, elle aussi, d’une atmosphère plus propice à la diffusion de l’art contemporain.

Jean-Michel Othoniel et Joana Vasconcelos se sont ainsi succédé les étés précédents au Pavillon Bosio, où l’association Monaco Project for the Art organise une exposition consacrée à un artiste de renommée internationale – cette année Yan Pei-Ming, invité à concevoir un projet in situ, en collaboration avec les étudiants de l’École supérieure d’arts plastiques.
Et qu’importe, après tout, si Jeff Koons, dont on attendait une exposition cet été, s’est une nouvelle fois désisté : le Grimaldi Forum s’est associé in extremis au Centre Pompidou pour monter avec succès l’exposition « Extra Large » qui réunit des œuvres monumentales de Matta, Dubuffet et Miró, mais aussi de Joseph Beuys, Daniel Buren, Bill Viola et Sol LeWitt.
Quant au Musée océanographique – qui montra voici deux ans une exposition de Damien Hirst – il consacre jusqu’à cet automne une exposition importante (« Littoral Zone ») à l’artiste britannique Marc Quinn. Les deux institutions et le Nouveau Musée national de Monaco – qui présentait à la Villa Paloma l’exposition « Houses » de Thomas Schütte – proposaient d’ailleurs jusqu’à la rentrée un « Pass expos » commun. « Nous voulons que les gens sachent que Monaco s’engage pour la culture, et pour l’art », déclarait il y a peu Paul Masseron, le ministre de l’Intérieur monégasque.

Dans les cartons, une importante fondation d’artistes
« C’est aussi une question de survie ; Monaco, c’est tout petit », remarque une galeriste. L’art contemporain surgit ainsi là où on ne l’attend pas forcément : les touristes qui se font photographier devant la sculpture d’orchidée géante surgie cet été dans les jardins du Casino ne savent peut-être pas qu’il s’agit d’une œuvre de Marc Quinn intitulée Burning Desire. « La ville fait 2 km2, remarque Emil Humbert, de l’agence d’architecture intérieure Humbert & Poyet, basée dans la principauté. Lorsque l’art y est mis en scène à l’occasion d’expositions, on s’y trouve forcément confronté quotidiennement, ce qui est de plus en plus souvent le cas. »

Chacun cherche à repousser les murs. Tandis que le gouvernement princier réfléchit toujours à un projet d’extension de son territoire sur la mer, dont il est trop tôt pour savoir s’il pourrait, comme le prévoyait le précédent plan, accueillir un complexe culturel, la directrice du NMNM, elle, a été contactée pour accompagner la création d’une importante fondation d’artiste qui pourrait voir le jour très prochainement.
Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que la commune dispose depuis cet été d’un tout nouveau port franc. Destiné à abriter les objets d’art, de collection et d’antiquité, exempts de droits de douane et de taxes durant la période de leur stockage, cet entrepôt est « un atout supplémentaire pour promouvoir le marché de l’art », estime son président Claude Valion. À l’échelle de la principauté, le bâtiment totalise une surface de seulement 560 m2 – un confetti comparé aux 15 000 m2 du port franc de Genève –, mais il constitue un signe positif à l’attention des collectionneurs étrangers et des  professionnels. « Avec l’ouverture du port franc, nous espérons aussi faire revenir des maisons de ventes, explique Claude Valion. Point fort de cette structure, le port franc offre la possibilité de sortir les œuvres pour une durée de trois mois, dans le cadre par exemple d’une exposition de prestige. Dont les visiteurs venus pour l’Aquarium et le ciel bleu pourraient également profiter.

Monaco, ses casinos, son circuit de Formule 1, ses plages, son aquarium, mais aussi son Nouveau musée national, ses galeries d’art contemporain et, depuis cet été, son port franc ouvert aux collectionneurs.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°650 du 1 octobre 2012, avec le titre suivant : Monaco joue la carte de l’art

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