Art contemporain

Claude Viallat - Le plaisir de peindre

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 25 juin 2012 - 710 mots

Avec lui, "le notariat en a pris un coup". Comprendre : Claude Viallat a choisi d’emprunter le chemin de la peinture plutôt que de suivre celui de son père et de son frère, notaires, emmenant avec lui ses deux filles. Par vocation ? Par opportunisme.

Parti s’inscrire aux cours du soir de commis d’architecture, il est rentré chez lui avec une inscription aux beaux-arts. La belle affaire.  "Mon père a vu que j’allais m’investir, il a été compréhensif." Le notariat prenait un vilain coup dont il allait se remettre. La peinture, elle, devait en prendre pour son grade.

De BVPT à Supports/Surfaces
C’est que Viallat fait partie de ceux qui l’ont remise en cause dès les années 1960. Ami de Dezeuze (rencontré aux beaux-arts de Montpellier) et de Parmentier (dont il dit volontiers qu’il les a "tous dominés d’une tête"), il a fondé avec Bioulès, Saytour, Pincemin et d’autres le groupe Supports/Surfaces, dont les premiers faits d’armes sont l’exposition  "La peinture en question" et des installations dans les rues de villages, à Céret ou Coaraze. C’était en 1969. Trois ans auparavant, il faillit rejoindre la cause de Buren, Parmentier et Toroni, sauf qu’entre ces trois-là et l’école de Nice naissante, dans laquelle il commençait à évoluer, ça ne collait pas vraiment… Viallat céda donc sa place à Mosset. Et BVPT de devenir BMPT.
Tant pis puisque l’aventure Supports/Surfaces le fera définitivement entrer dans l’histoire de l’art, faisant même de lui l’un de ses chefs de file, lui qui n’en a pourtant jamais été le théoricien. Mieux, lui qui en a démissionné tout juste deux ans après sa création, au moment où le groupe devenait "le satellite plastique" de la revue Tel Quel. Pourtant    socialiste occitaniste  convaincu, Viallat ne pouvait pas accepter le tournant politique –  et parisianiste  – du groupe emmené par Devade, le seul que Viallat ne fit pas rentrer dans la formation. La peinture aux peintres, la politique aux politiciens. N’en déplaise à Louis Cane…

La recherche de la vérité
Mais là où d’autres ont engagé un virage à 180°, Viallat n’a pas dévié de sa trajectoire. La toile, qui avait perdu son châssis en 1966, ne l’a jamais retrouvé depuis. Et ne le retrouvera probablement pas. À Nîmes, le long des murs de son atelier couverts de ses cerceaux et de ses objets précaires, sont empilées les toiles de parasols, de tentes et les bâches rangées par formes, envoyées de partout afin que le peintre y peigne ses "haricots", cette forme personnelle et neutre mise en place en 1966. Un accident devenu sa signature.
Chaque jour, Viallat choisit un support et le recouvre. Un sacerdoce et une discipline pour celui qui arrive à son atelier tous les matins à 10 h (après avoir discuté tauromachie avec ses copains du café Vauban) et le quitte à 12 h pour déjeuner avec son épouse Henriette. Reprise l’après-midi de 14  h à 16 h.
N’y a-t-il pas, à force, de la lassitude ? "Jamais !".  Après tout, les nombreuses générations d’artistes qu’il a formées dans les écoles de beaux-arts de Nice, Limoges, Marseille et Paris –  dont Noël Dolla et Valensi  – lui ont offert de vivre d’autres expériences. Par procuration. "Je suis un professeur gâté", admet cet affectif qui n’a "jamais eu le sentiment de posséder la vérité", ne s’interdisant pas de la chercher ardemment. Après tout, "peindre, c’est un plaisir".
Il n’y a qu’à regarder l’épaisseur de peinture sur le parquet de l’atelier pour mesurer l’ampleur de son plaisir. S’il a parfois rejeté les honneurs –  comme le poste de directeur de la Villa Médicis  –, Viallat n’a jamais refusé une exposition. "Pour le plaisir –  encore  !  – de montrer [son] travail.". Rien que cet été, Viallat présente ses œuvres dans trois musées, au Touquet, à Issoudun et à Louviers. Et rêve en secret d’Amérique où, lui a rapporté son fidèle ami et galeriste Bernard Ceysson, les jeunes artistes le regardent de plus en plus…

- Claude Viallat, aux marges de la peinture, Musée du Touquet-Paris-Plage (62), du 8 juillet au 18 novembre 2012, www.musenor.com

- Claude Viallat, œuvres récentes, Musée de l’hospice Saint-Roch, Issoudun (36), jusqu’au 16 septembre 2012, www.issoudun.fr

- Claude Viallat, peintures et objets , Musée de Louviers (27), jusqu’au 30 septembre 2012, www.ville-louviers.fr

Biographie

1936
Naissance à Nîmes.

1970
Exposition Supports/Surfaces, à l’Arc.

1988
Représente la France à la Biennale de Venise.

2000
Prend sa retraite d’enseignant à l’École des beaux-arts de Paris.

2012
Claude Viallat est membre du jury du Trophée Alain Godon, au Touquet.

Il est représenté par la Galerie Bernard Ceysson (Saint-Étienne, Paris, Luxembourg et Genève).

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°648 du 1 juillet 2012, avec le titre suivant : Claude Viallat - Le plaisir de peindre

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