Royaume-Uni - Patrimoine

Londres en effervescence perpétuelle

Par Christine Coste · L'ŒIL

Le 16 mai 2012 - 1370 mots

LONDRES / ROYAUME-UNI

Si les jeux Olympiques peuvent agir comme un formidable booster culturel pour la capitale britannique, celle-ci sait pouvoir compter sur un important maillage d'institutions qui confèrent déjà une identité à chacun de ses quartier.

Chaque matin, inlassablement, face à la Tate Modern, le pont du Millenium égraine ses joggeurs sur Bankside. De l’autre côté, sur la rive nord, au cœur de la City, la cathédrale Saint-Paul domine en perspective. Depuis la construction du pont suspendu de Norman Foster reliant le quartier des affaires à celui de Southwark, plus généralement depuis la campagne de grands travaux d’aménagement et de construction menée pour célébrer avec faste le tournant du millénaire, la rive sud de la Tamise, aux quartiers longtemps défavorisés et négligés, est devenue prisée.

Les quartiers sud rattrapent leur retard sur le nord
Il est vrai que la décision de la City à la fin des années 1980 de se développer sur l’Isle of Dogs, à 2 km à l’est, a marqué le début de la métamorphose des berges du fleuve. Désormais, entre les tours avant-gardistes de bureaux de Canary Wharf et le London Eye, roue panoramique installée face au palais de Westminster, ont émergé des habitations dans les docks réhabilités, des complexes résidentiels de luxe, des restaurants, des galeries et des musées, en particulier, en 2000, la Tate Modern, aménagée dans une ancienne centrale électrique, la Bankside Power Station. Avec 4,7 millions de visiteurs par an, ce haut lieu de l’art contemporain est devenu le plus fréquenté au monde. L’ouverture en juin de deux nouvelles salles dans d’anciens dépôts de carburant augure d’autres développements. Leur inauguration est prévue lors du Festival de Londres, manifestation culturelle qui propose, en parallèle du jubilé de la reine et des jeux Olympiques, divers événements dans la capitale et dans le Royaume-Uni [programme sur festival.london2012.com]. Cet été, Londres foisonne en effet de propositions culturelles invitant à arpenter les institutions et les quartiers où elles se déroulent, à commencer par cette rive sud à la transformation spectaculaire. La division traditionnelle entre la rive nord, prospère et centralisatrice de tous les pouvoirs, où se concentrent monuments, musées, écoles et grands magasins, et la rive sud, où ont pris place en vingt ans des équipements culturels tels le National Theatre, le Southbank Centre ou le Shakespeare’s Globe, s’estompe. Les prix de l’immobilier dans certains quartiers de la rive sud de la Tamise rivalisent d’ailleurs avec ceux de plusieurs quartiers de la rive nord. Les constructions de prestige s’y multiplient. En témoignent à proximité : le City Hall de Norman Foster, siège depuis 2002 de la mairie de Londres, et le Shard, le plus haut gratte-ciel d’Europe, flèche de verre culminant à 310 m, architecturée par Renzo Piano, qui devrait être achevée pour les jeux Olympiques. L’ouverture en octobre 2011 par la galerie White Cube d’un nouvel espace dans un ancien entrepôt de Bermondsey Street annonce également d’autres mutations à venir sur cette rive sud à longer à pied pour mesurer le tempo particulier qui l’anime, bien différent de celui qui vous happe dans l’East End de Londres, partie de ville vivante, vibrante et en continuelle mutation. À deux pas des hautes tours de la City, autour de Whitechapel Gallery, de Brick Lane et du Old Spitalfields Market – ancien quartier de l’industrie textile, cœur dès la fin des années 1940 des ateliers et des cantines des Sikhs, Pakistanais ou Bengalis –, artistes, stylistes, designers, antiquaires… se sont ainsi installés depuis une vingtaine d’années. Sur Brick Lane, l’ancienne brasserie The Old Truman Brewery (n° 91), avec ses cafés, ateliers, magasins et lieux d’exposition, symbolise ce changement.

Des quartiers « tirés » par les musées
Plus au nord, d’autres designers, artistes, galeristes, architectes et restaurateurs se sont établis le long des rues populaires de Shoreditch High, d’Hoxton et de Kingsland où s’étire le charmant Geffrye Museum contant au fil de period rooms le design des intérieurs des maisons anglaises de la Renaissance à nos jours. Sur Hoxton Square, la galerie White Cube a été l’une des premières à s’installer dans ces quartiers populaires à la gentrification débonnaire bien loin de l’atmosphère chic du quartier de Mayfair dans le West End de Londres où les plus grandes galeries, maisons de ventes, arcades et boutiques de luxe se concentrent à vingt minutes à pied de la National Gallery et de la National Portrait Gallery avec Old et New Bond Street en quintessence de l’opulence raffinée. East End et West End, les deux territoires historiquement et sociologiquement distincts déploient à profusion leurs différences et leurs attraits. À South Kensington, quartier du Victoria & Albert Museum en bordure de Kensington Gardens et de Hyde Park, demeures georgiennes ou victoriennes, façades néogrecques à colonnades et squares diffusent à cet égard un autre parfum d’élégance que l’ambiance villageoise de Chelsea prolonge à sa manière. L’ouverture en 2008 de la Saatchi Gallery a donné à ce quartier un air plus arty que la Tate Britain, tout aussi isolée dans le très résidentiel quartier de Westminster, a développé. À l’instar du British Museum, au cœur du quartier littéraire et intellectuel de Bloomsbury. En toute discrétion, évidemment.

La Serpentine Gallery
Logée dans un ancien pavillon de Kensington Gardens, cette galerie qui a accueilli les plus grands noms de l’art propose cet été une exposition « Yoko Ono ». Depuis 2000, elle expose aussi un pavillon éphémère réalisé par un grand architecte. Ce sont cette année les architectes Herzog & de Meuron et l’artiste Ai Weiwei qui ont été invités à le concevoir avant que ne soit inaugurée la Serpentine Sackler Gallery, nouvel espace d’exposition dessiné par Zaha Hadid et aménagé dans l’ancien dépôt à munitions des jardins.

www.serpentinegallery.org

La National Gallery
Fondée en 1824, elle abrite la plus prestigieuse collection de tableaux du pays, du Moyen-Âge au début du XXe siècle. Parmi les plus célèbres La Pentecôte de Giotto, Les Ambassadeurs d’Holbein, La Charrette de foin de Constable et une version des Tournesols de Van Gogh. Du 11 juillet au 23 septembre s’y déroule l’exposition « Metamorphosis: Titian », au programme du London Festival 2012. Installée à ses côtés, la National Portrait Gallery invite à découvrir les grandes figures britanniques vues par les artistes.

www.nationalgallery.org.uk, www.npg.org.uk


Le Victoria & Albert Museum
Le V&A rassemble la plus importante collection d’arts décoratifs du monde à découvrir au fil des cent quarante-six galeries consacrées aux costumes, bijoux, mobiliers, tableaux et à la sculpture, céramique et photographie. La section indienne n’a ainsi pas d’équivalent en Occident. De leur côté, les galeries britanniques retracent, de 1500 à 1900, quatre cents ans d’histoire de l’art et du design que l’exposition « British Design 1948-2012 » prolonge à sa manière jusqu’au 12 août.

www.vam.ac.uk


La Tate Modern
L’aménagement de la Bankside Power Station par les architectes suisses Herzog & de Meuron ouvre sur une immense salle des turbines régulièrement investie par un artiste contemporain. Aux étages, les galeries permanentes sont organisées par thèmes. Elles sont accessibles gratuitement, comme le sont les collections permanentes des musées de la ville. Seules les expositions temporaires, actuellement « Damien Hirst », sont payantes. Dans les années à venir, le musée bénéficiera d’extensions dont une tour de onze étages.

www.tate.org.uk

Jubilé de diamant

Pour rendre hommage aux soixante années de règne de la reine Elizabeth II, concerts, fêtes de rue et parades ont été programmés à Londres du 2 au 5 juin. Le dimanche, le défilé sur la Tamise d’un millier d’embarcations de tout le pays et d’ailleurs compte parmi les événements phare. Au lendemain de cette parade conduite par Sa Majesté et juste après la messe de Thanksgiving organisée le mardi 5 juin à la cathédrale Saint-Paul, la procession d’attelages d’apparat menée par la reine constitue un autre temps fort de ce jubilé célébré également au fil d’une programmation d’expositions. Telle « The Queen: Art and Image » à la National Portrait Gallery où sont présentés jusqu’au 21 octobre soixante portraits d’Elizabeth II. La Queen’s Gallery de Buckingham Palace avec « Leonardo da Vinci: Anatomist » livre de son côté jusqu’au 7 octobre des travaux inédits sur le corps humain du célèbre artiste. Quant à la traditionnelle ouverture estivale (du 23 juillet au 3 octobre) de Buckingham Palace, elle permettra de découvrir espaces de réception et salle du trône.

www.visitlondon.com/fr/

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°647 du 1 juin 2012, avec le titre suivant : Londres en effervescence perpétuelle

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