Le luxe de Poul

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 1 juillet 2006 - 388 mots

Deux lettres et un prénom identique : « PH » ou « PK ». Ils sont deux designers danois à avoir signé de leurs initiales une grande partie de leur production : Poul Henningsen et Poul Kjærholm. Si le style de « PH » n’est pas neutre, celui de « PK » l’est moins encore. Révolutionnaire même, pourrait-on dire, tant son apport fut détonnant au royaume du bois souverain.
Poul Kjærholm (1929-1980) s’est pourtant très tôt frotté aux diverses essences de la forêt. Dès l’âge de 15 ans, il est apprenti chez un ébéniste de Copenhague et deviendra d’ailleurs
rapidement un virtuose en la matière. Mais c’est un autre matériau qui va le révéler : l’acier inoxydable qu’il explore à l’envi avec, en point de mire, une production industrielle. Son luxe : marier des matériaux ou des techniques a priori antinomiques. S’il n’hésite pas à lorgner du côté du Bauhaus pour cultiver
un fonctionnalisme international à la manière d’un Breuer ou d’un Mies van der Rohe, Kjærholm ne se détourne pourtant pas totalement de la fabuleuse tradition artisanale danoise.
À la ligne minimale, un peu rigide, que dessine la structure, le designer associe une assise en matériau naturel, nettement plus « humaine ». C’est là peut-être la caractéristique majeure des créations de Kjærholm. Ainsi cette chaise longue, la PK 24, sans doute son chef-d’œuvre, mélange une structure froide et aérienne en acier à une assise en cannage délicat. Un style qui n’en finit pas de séduire.
À en voir la vente, le 26 octobre 2004, par la maison Artcurial, à Paris, d’un ensemble de meubles leur ayant appartenu, Danielle et François Mitterrand étaient, semble-t-il, plutôt friands de l’esthétique de Poul. Ce jour-là, un fauteuil de repos avait alors atteint 5 700 euros (le double de son estimation la plus haute) et une paire de tabourets était partie à 11 000 euros (le lot le plus cher de la vente).
Cette même année 2004, c’est le Museum of Modern Art de New York qui, lui, pour meubler ses nouveaux espaces fraîchement rénovés, était allé faire son marché dans le catalogue Kjærholm. Preuve s’il en est que la cote du créateur danois n’est pas près de fléchir.

« Poul Kjærholm », Louisiana Museum for Moderne Kunst, Gl.”ˆStrandvej 13, 3050 Humlebæk, à 35 km de Copenhague, Danemark, www.louisiana.dk, jusqu’au 24 septembre 2006.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°582 du 1 juillet 2006, avec le titre suivant : Le luxe de Poul

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