Pablo Picasso en morceaux !

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 1 décembre 2006 - 742 mots

Le maître espagnol est la référence absolue de l’art du siècle passé – quel que soit l’outil de mesure. On ne compte pas moins de trente-huit millions d’occurrences de son nom sur le moteur de recherche Google, loin devant Léonard de Vinci (vingt-cinq millions). Parmi les trois premiers tableaux les plus chers au monde, deux sont de Picasso : le Garçon à la pipe (93 millions de dollars, 2004) et le Portrait de Dora Maar de 1941 (85 millions, 2006). Picasso ne cesse d’être exposé dans le monde. Artindex, le calendrier des expositions sur le site Internet de L’œil, répertorie plus de trente-cinq manifestations qui lui sont dédiées depuis 2005. Et cette fin d’année 2006 est marquée par au moins quatre grandes expositions.

Si une rétrospective d’ampleur est une forme de reconnaissance d’un artiste, l’impossibilité d’en réaliser une est la marque des grands. À cette seule aune, Picasso est un géant.
Son œuvre est trop vaste pour qu’une exposition soit représentative. Ses pièces majeures sont aussi trop coûteuses pour des primes d’assurances de transport de plus en plus élevées. La dernière exposition d’envergure remonte à 1979, lorsque plus de huit cents pièces reçues en dation de paiement pour les droits de succession ont été montrées au public à Paris.
Car Picasso gardait tout. Ayant connu rapidement le succès, il a conservé de nombreuses pièces, notamment de ses débuts. Même aujourd’hui, le musée Picasso à Paris ne peut exposer toutes les œuvres reçues en dation.

La collection Berggruen
D’autant que l’hôtel Salé a entrepris d’accueillir temporairement des collections extérieures. Il présente actuellement une sélection de la collection Berggruen. Allemand d’origine, naturalisé américain, ce marchand d’art, qui a fait don de sa collection à un musée de Berlin, est le dernier témoignage de cette génération d’après-guerre qui pouvait encore acquérir des pièces majeures de Picasso. C’est l’un des enseignements de cette exposition qui, au demeurant, n’apporte pas grand-chose au riche musée.
Picasso ne se visite plus donc qu’en morceaux. Son œuvre si étendue et diverse se donne à voir thématiquement. Le découpage chronologique s’impose naturellement. Les Picasso des premières années, ceux des périodes bleue et rose, ont été présentés à Boston (Museum of Fine Arts, 1997). Puis c’est la fameuse « cordée » avec Braque au cours de laquelle, entre 1907 et 1914, les deux peintres ouvrent la voie du cubisme (Museum of Modern Art, New York, 1989). Dans l’entre-deux-guerres, Picasso métamorphose la figure humaine et fréquente les surréalistes (fondation Beyeler, Suisse, 2005). Après 1945, c’est la période heureuse dans l’atelier que la Ville d’Antibes offre à Pablo dans le château Grimaldi (Palazzo Grassi, Venise, p. 17). Plus tard, devenu un personnage public, l’auteur de Guernica continue à faire du Picasso, sans se renouveler selon certaines âmes chagrines (Albertina, Vienne, p. 22).

Femmes, femmes, femmes
Les nombreuses femmes de Picasso (« Picasso, muses et modèles », Malaga, p. 20) et leurs multiples portraits (« Picasso et le portrait », Paris, 1996) sont un « marronnier » de la muséographie du peintre. Tous les ingrédients d’un succès populaire garanti sont réunis : une vie affective tumultueuse, des visages déformés mais identifiables, et du sexe (« Picasso érotique », Paris, 2001).
Picasso aimait peindre les femmes. Des inconnues (« Portraits d’Arlésiennes », Arles, 2005) ou celles qui ont partagé sa vie. Notamment Dora Maar entre 1935 et 1945 (Paris, 2006) qu’il peignait de mémoire car elle ne posa jamais pour lui.
Enfin, thèmes et pratiques sont un champ d’investigation sans limites tant la curiosité insatiable de Picasso s’est exprimée de différentes façons : le cirque (musée Picasso, Barcelone, 2006), les arts appliqués et en premier lieu la céramique (La Piscine, Roubaix, 2004) et même l’Afrique où il n’a pourtant jamais mis les pieds (Afrique du Sud, 2005). La muséographie de Picasso est décidément très cubisante.

Biographie

1881 Pablo Picasso naît à Málaga. 1895 École des beaux-arts de Barcelone. 1904 Il s’installe à Montmartre dans l’atelier du Bateau-Lavoir. 1908 Il fait la rencontre de Georges Braque. 1912 Réalise le premier collage de l’art moderne : Nature morte à la chaise cannée. 1937 Peint Guernica pour le pavillon espagnol de la Foire Internationale. 1948 Au Parti communiste français, la publication d’un portrait de Staline par Picasso fait scandale. 1963 L’artiste fait don de la quasi-totalité de ses œuvres de jeunesse au musée Picasso de Barcelone. 1966 Le public fait un triomphe à la rétrospective organisée au Grand et au Petit Palais à Paris. 1973 Pablo Picasso décède à l’âge de 92 ans

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°586 du 1 décembre 2006, avec le titre suivant : Pablo Picasso en morceaux !

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