Maîtres chinois et flamands

Confrontation au sommet

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 2 août 2007 - 413 mots

 L’histoire des relations entre Occident et Extrême-Orient est riche et mouvementée. On la raconte souvent au nombre de comptoirs que l’un a installés chez l’autre au fil du temps, quand ce n’est pas à l’aune d’une aventure coloniale à laquelle le xxe siècle a mis définitivement fin. On la dit plus rarement au regard d’une comparaison entre deux productions artistiques, deux manières de représenter le monde. Dans le contexte de la mondialisation, le palais des Beaux-Arts de Bruxelles et le Palace Museum de Pékin ont choisi de jouer cette nouvelle carte.
Les deux institutions ont ainsi demandé à un artiste – Luc Tuymans – et à un commissaire indépendant pékinois – Yu Hui – de concevoir une exposition organisant la confrontation de tout un lot de chefs-d’œuvre de maîtres chinois et flamands du passé. Leur idée a été de « nourrir un dialogue qui n’ôte rien aux deux traditions ».
Le résultat est concluant : si les œuvres qu’ils ont retenues font état de leurs spécificités identitaires, d’époque et de culture, elles n’en présentent pas moins certaines qualités et recherches plastiques convergentes.
Dans cette exposition, il est question de préoccupations fondamentales à l’égard du traitement de l’espace, de l’échelle, de la figure ou du détail. Tandis qu’aplat et découpe caractérisent l’art des Asiatiques, celui des Occidentaux recourt aux jeux de la perspective et des valeurs. Mais si la frontalité de La Concubine impériale de l’empereur Hongli (vers 1750), une peinture anonyme, s’oppose en tout point à la vision illuminée du Portrait de Andrew Carnegie par Léon Spilliaert (1913, lire aussi p. 38), on peut relever ailleurs certaines analogies. De fait, le même sens du détail, la même précision du trait et la même transparence lumineuse chez Lan Ying et Jan Bruegel quand ils dessinent respectivement un Paysage de montagne (vers 1600-1650) et une Caravane sur route champêtre (vers 1600).
Dessins et tableaux de Van Eyck, Rubens et Van Dyck, mais aussi de Ensor, Mellery et Magritte sont ainsi confrontés à nombre d’œuvres des dynasties Ming et Quing, ainsi que du début de la République de Chine.
Exécutées sur papier, voire sur soie comme il est de tradition en ce pays, elles sont toutes en provenance directe de la Cité interdite. C’est dire le caractère exceptionnel d’une telle réunion, à ne manquer à aucun prix.

« L’Empire interdit. Visions du monde des maîtres chinois et flamands », Palais des Beaux-Arts, 10, rue Royale, Bruxelles (Belgique), tél. 00 32 02 507 84, www.bozar.be, jusqu’au 6 mai 2007

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°589 du 1 mars 2007, avec le titre suivant : Maîtres chinois et flamands

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