Cosmodrome… entre œuvre d’art totale et environnement « générateur de sensation »

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 août 2007 - 414 mots

En 1991, Dominique Gonzalez-Foerster amorce une longue fréquentation de l’Arc (structure intégrée au MAMVP) aux côtés de Xavier Veilhan et Absalon.
2007. En récidiviste, Expodrome lui donne l’occasion d’infiltrer à nouveau l’architecture du Palais de Chaillot. Toute l’architecture. Escaliers, passerelle, replis et même La Fée Électricité, vertigineuse peinture de 600 mètres carrés exécutée par Raoul Dufy en 1936, sont de la partie.
Articulées en expériences déambulatoires, les différentes séquences de l’exposition composent comme une ville fantasmée : un solarium, une promenade, un quai, un panorama, un cinéma, des zones d’attente. Le dedans pourrait bien être le dehors.

Bon voyage…
Parmi ces entités voyageuses, il en est une que Dominique Gonzalez-Foerster réactive. Imaginé en 2001, le Cosmodrome se comprend d’abord comme un son et lumière, entre œuvre d’art totale
et environnement « générateur de sensation ».
Le visiteur commence par attendre son tour pour une séance de dix minutes. Comme au cinéma. Comme au spectacle. Puis l’odyssée cosmique s’engage sur un mode sensible. Une plongée dans le noir, les pieds dans le sable. Mi-doux, mi-inquiétant. On distingue à peine les ombres de nos compagnons de vaisseau, à peine les contours de l’espace, et la dramaturgie s’installe : les
séquences, colorées et spatiales s’enchaînent. Points scintillants, constellations, trajectoires incandescentes sont accordés sur la musique veloutée et précise de la star suédoise de l’électro-pop Jay-Jay Johanson.
Sur un mode science-fictionnel un peu désuet, on imagine une exploration céleste. Un film de Kubrick qui se serait égaré dans le fantasme d’un voyage intergalactique version xixe siècle.

Expérience collective
Le Cosmodrome prend ses quartiers à l’Arc par le détour, l’extension. C’est par une passerelle
extérieure qu’on y accède. Comme si l’on montait à bord. En guise de préambule ou d’invite, réelle, à l’attente, Dominique Gonzalez-Foerster installe un tapis de lecture, carré orange profond sur les bords duquel échouent des piles de livres choisis par l’artiste.
Le dispositif simplissime rapporte quelques-unes des préoccupations de la jeune femme. Sur ce petit bout de moquette se joue la mise en espace de la littérature – si décisive chez l’artiste – autant que celle du spectateur. Tapis d’éveil, carré récréatif, espace zen, nouvelle invitation à l’échappée intime, cette bibliothèque au sol offre un réservoir de personnages, de fictions, de fantômes, à partager avec elle.
Le visiteur arraché à son conditionnement de spectateur d’exposition est projeté dans un environnement qui, une fois encore, s’écarte de l’objet pour lui substituer une expérience collective et relationnelle. À moins que ce ne soit encore un « plan d’évasion ».

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°589 du 1 mars 2007, avec le titre suivant : Cosmodrome… entre œuvre d’art totale et environnement « générateur de sensation »

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