Psychopathes, détraqués, tueurs en série… leur vie et leur légende sous le pinceau de Joe Coleman

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 31 juillet 2007 - 417 mots

À cinquante-deux ans, collectionné par Dennis Hopper, Iggy Pop ou Johnny Depp, Joe Coleman est, en France, une découverte. Aux franges de l’art brut, dans un style dû autant à l’impulsivité autodidacte qu’à une solide culture du comics à la Robert Crumb, ses toiles témoignent d’un univers underground torturé.

Panthéon trash
Cet artiste, performeur, musicien et acteur, est une personnalité de New York, fasciné depuis l’adolescence par les psychopathes, détraqués et autres serial killers.
Il immerge ses héros dans une atmosphère très gothique, tout inspiré qu’il est par l’art de l’enluminure médiévale.
Ainsi en est-il du Portrait de Charles Manson (1988), le tueur de Sharon Tate, alors enceinte de l’enfant du réalisateur Roman Polanski et poignardée à mort par le dément et ses disciples en 1969. Il règne halluciné sur une mer de feu, le front signé d’un svastika (symbole nazi). Des corps suppliciés de femmes hantent les pourtours de la composition présidée par Jésus et Adolf Hitler dans un tableau digne de Jérôme Bosch ou d’un adolescent incarcéré pour avoir incendié le garage de ses parents. Coleman a eu ce type d’enfance problématique, fasciné par la religion et les saints martyrs. Signe du hasard ou du destin, le massacre de Sharon Tate fut perpétré le jour de ses seize ans.
Manson, héros de l’Amérique white trash, n’est pas le seul à figurer au sombre panthéon personnel de ce personnage barbu impressionnant. On y retrouve Bonnie Parker et Clyde Barrow, Jesse James, Ed Gein, qui inspira le personnage Norman Bates dans Psychose de Hitchcock, mais aussi Timothy McVeigh, auteur de l’attentat d’Oklahoma City en 1995, ou encore John Dillinger. La mort de cette légende du grand banditisme des années 1930, est célébrée par son fan club tous les 22 juillet.
L’ironie veut que cet artiste sauvage, vomissant le milieu de l’art, soit aujourd’hui célébré au Palais de Tokyo. Dans sa peinture minutieuse, ce peintre qui se décrit lui-même comme un apocalyptique visionnaire, apparaît parfois.
I am Joe’s Fear of Disease, de 2001, a été réalisé alors qu’il venait de subir plusieurs chocs anaphylactiques, inexpliqués par la médecine. Il affronte sa peur de la maladie et de la mort en extrapolant les origines des crises, d’un empoisonnement des reins à des fièvres tropicales. Afin d’exorciser ses peurs, Coleman utilise l’imagerie médicale dans sa peinture naïve tout droit sortie d’une bande dessinée. L’artiste y trône, la gauche de son corps disséquée comme dans un livre de science, canalisant les maladies et révélant combien la médecine est impuissante face aux croyances.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°590 du 1 avril 2007, avec le titre suivant : Psychopathes, détraqués, tueurs en série… leur vie et leur légende sous le pinceau de Joe Coleman

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