Arménie

L'histoire de son art sacré révélée au Louvre

Par Laure Meyer · L'ŒIL

Le 31 juillet 2007 - 424 mots

La mémoire de l’Arménie se confond avec son art sacré. Quand ses voisins trop puissants l’ont envahie, ont déferlé sur elle, siècle après siècle, c’est dans sa religion, dans son art chrétien qu’elle a préservé son unité, puisé le ciment identitaire qui a fait d’elle une nation.
La grande exposition « Armenia Sacra » du musée du Louvre raconte cette histoire à travers un choix de deux cents œuvres venues d’Arménie. Il en ressort que la confrontation avec ces envahisseurs qui avaient chacun leur propre civilisation a apporté à l’art arménien une richesse artistique indéniable et une séduisante singularité.
Au ive siècle, l’Arménie devient chrétienne. Dès le ve, elle se dote d’un alphabet national, gage d’autonomie. Plus tard, malgré les multiples conflits avec ses voisins, son art s’épanouit d’abord aux frontières de Byzance et de l’Islam, puis lors des traversées des croisés, avant de se renouveler au contact des Empires perse et ottoman. Cohabitations et croisements ont ainsi façonné manuscrits enluminés, sculptures ou  reliquaires.
Certains feuillets peints sur parchemin, parmi les plus anciens au monde, reflètent des influences syriennes et palestiniennes comme L’Annonce faite à Zacharie conservée sous la reliure sculptée en ivoire de L’Évangéliaire d’Etchmiadzine (vie siècle). Au xiiie, un renouveau artistique d’une rare beauté voit fleurir quatre manuscrits enluminés à fond d’or. Dans le Lectionnaire du roi Hétoum (1286), La Présentation au Temple séduit par ses personnages aux lignes harmonieuses, son cadre architectural, un certain désir de réalisme évoquant le gothique au temps des croisades.
Ensuite, c’est au contraire l’art perse qui influence des évangiles moins somptueux.
Les khatchkars, révélation de l’exposition, sont de grandes dalles de pierre dressées et sculptées d’une croix. Datés du xe au xiiie siècle, affirmant avec force la foi chrétienne, les khatchkars reflètent
cependant dans la sobriété de leur décor en entrelacs une indéniable influence islamique. Pour l’art de cour, le relief montrant le Prince Amir Hassan chassant  évoque la vie des princes seldjoukides.
Des reliquaires finement ouvragés, proches des reliquaires occidentaux, rappellent les traditions de l’Église latine transmises par les croisades. Mais le goût évolue. En 1300, le Reliquaire de la Croix en or et pierres précieuses séduit par sa sobriété. Plus tard, La Main de saint Jean-Baptiste cède au goût du temps en adoptant une forme anatomique, tout comme le Bras-reliquaire de saint Thaddée (xviie siècle) où le joaillier multiplie à plaisir les filigranes d’argent et cabochons de couleur.

« Armenia sacra », musée du Louvre, aile Sully, rue de Rivoli (Pyramide du Louvre), Paris Ier, tél. 01 40 20 53 17, www.louvre.fr, jusqu’au 21 mai 2007.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°590 du 1 avril 2007, avec le titre suivant : Arménie

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque