Cohabitation allemande

En trente ans, l’art allemand s’est imposé autour de figures majeures, de Richter à Beuys. Si ce dernier est célébré à Gravelines pour l’été, le LAAC a rassemblé une équipe germanique de rêve, confrontant jeunes espoirs et monstres quasi sacrés dont les œuvres proviennent, pour une large partie, du Frac Nord-Pas-de-Calais voisin.
Au fil des rencontres, des dialogues et des disputes, on croise une délicate pierre de lait de Wolfgang Laib, pas moins de six toiles du géant Richter (dont une datant de 1966, Pyramide, représentation floue du monument de Gizeh), les fameuses photographies objectives d’architecture industrielle des époux Becher ou encore un cabinet de dessins consacrés aux œuvres de Polke.
Tous les médiums alternent chez ces références comme parmi les plus jeunes artistes présentés ici, du peintre Anton Henning aux sculpteurs Tue Greenfort et Markus Sixay, les deux découvertes vraiment excitantes de l’exposition. Le premier bricole de bric et de broc un atelier mobile de recyclage de verre dans la lignée des assemblages de Rauschenberg, tandis que le second déploie une hélice de cintres colorés qui évoque le fameux mobile fait des mêmes objets que Man Ray photographia en 1920 (Obstruction) et s’inscrit avec humour dans l’histoire du ready made.
Le partage d’une histoire commune, de racines artistiques concomitantes, voilà bien le cœur du raisonnement développé au fil des huit salles dévolues au parcours qui nous entraîne sur les traces de cet art allemand relu sans nationalisme.