Olivier Debré

Peintures d'espace

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 31 juillet 2007 - 396 mots

 Dans un grand hangar désaffecté de l’aéroport du Bourget, il est là au beau milieu d’une immense flaque de couleur rouge. Une combinaison blanche enfilée par-dessus ses habits, des sacs plastiques simplement ficelés autour de ses chaussures, Olivier Debré pousse des deux mains un grand balai-brosse comme s’il ratissait la peinture. Nous sommes en 1987, le peintre travaille au nouveau rideau de théâtre de la Comédie-Française dont il a reçu commande.
Architecte de formation, Olivier Debré (1920-1999) était coutumier de ce genre d’exercice et il n’a cessé de le pratiquer que ce soit en atelier ou in situ, face à la Loire qu’il aimait tant. Excellant à passer d’un tout petit format à un immense – ce qui en dit long du sens de l’espace qui était le sien –, Olivier Debré se saisissait volontiers de grands, voire de très grands formats pour mieux embrasser l’espace. Comme on respire profondément pour emplir ses poumons de tout l’air environnant ou comme on ferme les yeux pour mieux se perdre dans une infinitude.
L’exposition rétrospective que le musée d’Angers consacre à ce peintre pas toujours reconnu à la hauteur de son immense talent vise précisément à mettre l’accent sur ses grands formats. Ce faisant, c’est un véritable hymne à la couleur qui s’en élève. D’un Concert champêtre ou Grande Brune, daté 1947-1952, à cette Coulée d’ocre mouvante taches vives losange courbe Touraine de 1997, tout l’art de Debré se décline en grandes étendues et en îlots de matière colorés, en longues coulées monochromes, en flux et en reflux permanents de la peinture.
S’il fut un temps où certains « signes personnages » pouvaient y trouver leur place, la couleur les a par la suite littéralement engloutis car c’est à l’expérience sensible et visuelle d’une immersion que la peinture de Debré nous convie. À l’écho de celle éprouvée par l’artiste dans la nature : « La nature, disait-il, c’est sûr que j’y plonge et que j’en ai besoin. Elle est la principale source de mon inspiration. » Pour lui, la nature n’est pas un refuge mais un interlocuteur, cet autre avec lequel on échange. Aussi l’œuvre d’Olivier Debré est-elle à l’aune tout en même temps d’une mesure et d’une démesure, d’une dépense et d’une économie, d’une fiction et d’une réalité.

« Olivier Debré. Rétrospective Grands Formats », musée des Beaux-Arts, 14, rue du Musée, Angers (49), tél. 02 41 05 38 00, jusqu’au 4 novembre 2007.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°593 du 1 juillet 2007, avec le titre suivant : Olivier Debré

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