Art ancien

La religion de la peinture et le renouveau de la peinture de religion à Lyon

Par Colin Lemoine · L'ŒIL

Le 26 juillet 2007 - 402 mots

LYON

La fortune de Lyon tient pour partie à ce qu’elle fait figure d’épicentre français de la chrétienté et à ce que, comme le souligne Philippe Dufieux dans le précieux catalogue de l’exposition, « le sang de ses martyrs a irrigué le christianisme en Gaule ». Dès lors, l’art lyonnais, en quête d’identité, ne cessa d’interroger des origines qui conjuguaient antiquité et christianisme.

Du mysticisme…
Si cette religiosité consubstantielle à la ville de Lyon vit naître des artistes versés en théosophie, elle livra par la suite des peintres qui, tels Puvis de Chavannes et Alexandre Séon, exploitèrent sur un versant symbolique, voire symboliste, des formules esthétiques éprouvées. Retour sur une orientation majeure qui, précisément, devait faire école… Le Bien et le Mal (1832) de Victor Orsel illustre l’orientation profondément pieuse, voire miséricordieuse de la peinture lyonnaise d’alors. Mais si elle participe d’un rigorisme sans faille, la toile n’en est pas moins animée d’innovations formelles, depuis la répartition savante des couleurs mates à sa compartimentation en séquences. Cette singularité – et l’exposition lyonnaise a le mérite de le démontrer par le truchement d’œuvres importantes – doit beaucoup aux nazaréens allemands, tels Cornelius ou Overbeck, dont « la mystique, même effusive et sincère, dévore la vie » ainsi que l’écrivit Henri Focillon après son directorat… du musée des Beaux-Arts de Lyon.

… au symbolisme
Avec son cycle spiritualiste Poème de l’âme (1835-1855), Louis Janmot oriente sa peinture vers un mysticisme exacerbé dont témoigne Génération divine. Daté de 1854, ce tableau issu de la doctrine illuministe confine, en vertu de procédés radicalement nouveaux, à une étrangeté d’autant plus inquiétante qu’elle semble sibylline. D’un symbolisme magnétique, les couleurs flamboyantes et la liberté graphique ne sont pas sans évoquer l’ésotérisme initiatique de Philipp Otto Runge ou de William Blake, ni sans anticiper les œuvres d’un Gustave Moreau ou d’un Odilon Redon.

Un relais de la modernité
Aussi les origines rhodaniennes d’Alexandre Séon et Puvis de Chavannes ne peuvent-elles surprendre. Affranchi de l’occultisme religieux de ses aînés, ce dernier exploite sur un versant allégorique leurs formes pures et lisibles qu’il restitue au sein d’une Antiquité onirique. Parmi tant d’autres, L’Été (1891) et L’Hiver (1892) du Petit Palais permettent d’envisager combien sa science de la composition, sa recherche de la planéité ou encore son synthétisme idéaliste offrirent des solutions formelles à des générations d’artistes, de Seurat à Picasso. À l’époque où Lyon, avec le grand escalier de son musée, était l’un des relais de la modernité…

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°591 du 1 mai 2007, avec le titre suivant : La religion de la peinture et le renouveau de la peinture de religion à Lyon

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