P. de Württemberg

Prince des auctioneers

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 26 juillet 2007 - 592 mots

Sous l’Ancien Régime il était interdit aux nobles, sous peine de déchéance, d’exercer une activité commerçante. Aujourd’hui les nouveaux aristocrates sont pleinement dans leur siècle. Philipp de Württemberg est de ceux-là, un subtil arrangement entre un manager international et un grand patricien, le tout enrobé d’une cordiale simplicité. Pas cette simplicité des princes à l’égard de leurs sujets, non, une simplicité naturelle et empathique.
Petit-fils du comte de Paris par sa mère et héritier d’une prestigieuse lignée allemande par son père, le patron de Sotheby’s arbore un sourire chaleureux. Une décontraction d’autant plus assurée que son parcours a les allures d’une success story. Élevé dans les châteaux familiaux allemands, il revendique une double culture. « Je suis trop latin pour les Allemands et trop rigoureux pour les Français. » Après des études en histoire de l’art et une thèse sur les cabinets de curiosités, c’est un peu par accident qu’il entre chez Sotheby’s. Et de raconter pour la énième fois, qu’à force de le voir conseiller et passer des ordres pour des amis, la maison de vente lui a offert de transformer un passe-temps en métier.

L’instinct du chasseur
Après trois ans, le voilà propulsé à la tête de la filiale allemande, non sans avoir accompli un parcours initiatique dans les différents services dont une longue mission d’expert en mobilier à Londres. Un lustre plus tard, tout en conservant ses responsabilités, il remplace la princesse (!) de Beauvon-Craon à la tête de Sotheby’s France. Pas mal pour un jeune homme qui aspirait à être restaurateur de meubles et qui ambitionne toujours de se consacrer un jour à la peinture.
Il est vrai que le duc a de l’énergie à revendre. De son service militaire dans les commandos parachutistes, il a gardé le goût des sports de combat, pratiquant le kick boxing. Il admet cependant se shooter au Red Bull, une boisson énergisante peu connue en France. Car l’agenda du duc est très millimétré. Quatre jours à Paris, trois en Allemagne pour superviser les opérations et retrouver sa famille, sa femme (une princesse de Bavière), et leurs quatre enfants dans leur gentilhommière à côté de Francfort.
Le discours est tout aussi formaté. « Sotheby’s met le client au centre de ses préoccupations et veut lui apporter le meilleur service. » Et une pierre dans le jardin de ses collègues français. « Nous privilégions les grandes ventes et la rentabilité, au volume. » Et un menhir dans le territoire de son alter ego Christie’s, le concurrent de toujours. Celui sans qui la compétition aurait moins de saveur. Car Philipp a un instinct de chasseur (qu’il est), identifier la proie (une pièce unique ou une collection), convaincre ses propriétaires de la vendre, et ramener le trophée, voilà ce qui le fait se lever le matin.
Trouve-t-il le temps de collectionner pour lui-même ? Oui, un peu. Il reconnaît épouser son temps et être passé du mobilier xviiie à l’art contemporain chinois. Mais il n’est pas sûr que le futur lui en laisse beaucoup le loisir. Il vient en effet d’ajouter le titre de vice-président Europe sur son CV, et de racheter la SVV Calmels Cohen. Le duc n’a que quarante-trois ans et une voie royale s’ouvre devant lui.

Biographie

1964 Diane de France donne naissance à Philipp, en Allemagne. 1993 Maîtrise en histoire et études d’histoire de l’art à l’université de Tübingen. 1996 Entre chez Sotheby’s Londres comme spécialiste du département mobilier européen. 1997 Doctorat en histoire de l’art. 1999 Promu directeur de la filiale allemande. 2004 PDG de Sotheby’s France. 2007 Naissance de son quatrième enfant. Nommé en mars vice-président de Sotheby’s Europe.

Pour en savoir plus

www.sothebys.com Le site est une véritable interface entre la maison de vente et ses acheteurs et/ou vendeurs. Didactique et polyglotte, il présente l’histoire de la société et son actualité commerciale avec, bien sûr, le calendrier et les résultats des ventes. Des procédures à suivre aux formalités financières, vous trouverez tous les renseignements nécessaires à vos futures transactions. Avant tout informationnel, sothebys.com n’organise plus d’enchères en ligne. C’est désormais le site d’eBay, avec lequel la société est associée, qui prend en charge les ventes sur Internet.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°591 du 1 mai 2007, avec le titre suivant : P. de Württemberg

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