Suisse

Dans l’Hermitage

La Fondation expose sa collection « De Tiepolo à Degas»

Par Suzanne Lemardelé · Le Journal des Arts

Le 13 mars 2012 - 629 mots

LAUSANNE - Événement rare à la Fondation de l’Hermitage, l’institution dévoile, le temps d’une exposition, sa propre collection. Si des accrochages temporaires sont régulièrement organisés dans la fondation, ils sont habituellement consacrés à d’autres fonds.

Les musées d’Athènes, de Barcelone, de Lyon, les collections Barbier-Mueller, Planque et Gould, entre autres, ont déjà bénéficié du cadre idyllique de la demeure, située sur les hauteurs de Lausanne, en Suisse.

Pour sa première exposition en tant que directrice de la Fondation, Sylvie Wuhrmann a souhaité replacer la collection de l’institution au centre du propos. Car si l’Hermitage ne dispose pas de budget d’acquisition régulier, la générosité de ses mécènes et de ses donateurs lui a permis d’accumuler au fil des ans un bel ensemble d’œuvres d’art, « de Tiepolo à Degas », selon l’intitulé de la présentation, et même au-delà. Dessins et peintures de Suzanne Valadon ont par exemple rejoint la collection en 2007 grâce à un don. Quant à la correspondance de Magritte avec le poète Gui Rosey, elle fait partie du fonds depuis 1989. Restait à tirer parti de l’étendue chronologique de cette collection sans y noyer le propos. Pari réussi, grâce à des mises en perspective et un jeu de résonances qui stimulent l’intérêt du visiteur.

Du Léman à Venise
Le parcours s’organise autour des œuvres clés de la collection, nouvellement éclairées grâce à des confrontations avec d’autres toiles issues de collections publiques et privées suisses. Ces nombreux prêts (représentant environ deux tiers des œuvres exposées) permettent à la famille Tiepolo d’ouvrir l’exposition au grand complet. Sont ainsi réunis des dessins du père, Giambattista, et de ses fils, Domenico et Lorenzo. Disposées côte à côte, les deux Têtes de vieillard (1770) et la Tête de l’archange Michel (1752), réalisées par le cadet de la dynastie vénitienne, forment un triptyque à la force expressive saisissante. Quant à L’Embarquement (1791) de Domenico, il crée une transition parfaite avec les scènes de genre du peintre vaudois François Bocion (1828-1890). Dans les toiles de l’artiste, l’eau est omniprésente. Celle du lac Léman d’abord, où glissent les embarcations des premiers plaisanciers. Celle de Venise également, où la palette du peintre suisse se diversifie pour atteindre parfois une violence chromatique. La vue imprenable sur le lac et les montagnes depuis le grand salon de la demeure offre un écrin parfait pour ces scènes aquatiques. L’harmonie ainsi créée ajoute au plaisir de la visite dans un espace avant tout conçu pour y vivre.

Aujourd’hui maison-musée, la demeure de l’Hermitage fut léguée à la Ville par la famille Bugnion en 1976. Trois ans plus tard, le don du tableau de Sisley La Seine à Saint-Cloud (1879) plaçait l’émergence de la collection sous le signe de l’impressionnisme. Rien d’étonnant donc à ce que des salles du premier étage de l’exposition lui soient dédiés. À la luminosité des toiles de Sisley succède l’intensité des pastels de Degas, dont les grandes Danseuses au repos (1898) sont mises en valeur sur des cimaises d’un bleu profond. Clin d’œil entre les différents espaces, un éventail japonisant du maître rappelle le véritable accessoire exposé dans la salle adjacente. Outrepassant les bornes chronologiques du titre, les toiles réalisées par Vuillard et Vallotton lors de leur séjour dans la région offrent un témoignage de leur vie en Suisse, de même que les œuvres des peintres vaudois du début du XXe siècle. La Fondation de l’Hermitage rend ici un bel hommage à son histoire.

AU FIL DES COLLECTIONS, DE TIEPOLO A DEGAS

Commissariat : Sylvie Wuhrmann, directrice de la Fondation de l’Hermitage
Nombre d’œuvres : environ 140

Jusqu’au 20 mai, Fondation de l’Hermitage, 2 route du Signal, Lausanne, Suisse, tél. 41 21 320 5 01, www.fondation-hermitage.ch, tlj sauf lundi 10h-18h, jusqu’à 21h le jeudi. Catalogue, coéd. Fondation de l’Hermitage/5 Continents Editions, Milan, 208 p., 35 €, ISBN 978-8-87439-621-4.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°365 du 16 mars 2012, avec le titre suivant : Dans l’Hermitage

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