Peinture flamande

Larry Silver, « Bruegel »

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 14 février 2012 - 554 mots

L’historien de l’art Larry Silver signe une nouvelle, et originale, monographie sur le peintre qui fit carrière à Anvers.

« Parce qu’il livre tant de beauté et de charme pour traduire visuellement des pensées profondes, Bruegel demeure éternellement fascinant – et la meilleure façon de l’aborder reste de contempler longuement ses œuvres, en y revenant souvent, ce qui est finalement le propos de cet ouvrage. » C’est par ces quelques mots que Larry Silver, professeur d’histoire de l’art à l’université de Pennsylvanie et spécialiste de l’art flamand, conclut l’ouvrage qu’il a réalisé sur Pieter Bruegel l’Ancien (vers 1525-1569), pour les éditions Citadelles & Mazenod. L’auteur y évoque les nombreux débats menés autour de Bruegel au sein de la communauté des historiens de l’art, avec Walter S. Gibson pour fer de lance. Il fait le point sur les derniers travaux réalisés sur l’artiste, notamment ceux que Hans Mielke a consacrés aux dessins, l’étude de Nadine Orenstein sur ses gravures, ainsi que les monographies de Roger Marijnissen (ouvrage publié en 1988 et réédité en 2003) et Manfred Sellink (2007). Ces textes ont fourni à Larry Silver une source « essentielle » à son étude et lui ont permis de proposer une approche plus libre de l’œuvre de Bruegel, affranchie du traditionnel carcan chronologique.

À travers une douzaine de chapitres, est brossé le portrait d’un peintre et dessinateur connu à Anvers comme le « second Bosch », et dont les œuvres « défient le spectateur en l’engageant profondément ». Larry Silver relève les correspondances et différences fondamentales existant entre Bruegel et Bosch, dont il avait signé en 2006 la monographie publiée par la même maison. Il présente d’ailleurs ces deux ouvrages comme étant complémentaires pour appréhender dans leur ensemble « les tendances essentielles des arts visuels des Pays-Bas durant plus d’un siècle ».

Le texte analyse en détail les œuvres de l’artiste, y compris celles qui ont été perdues et sont connues grâce aux copies exécutées par ses fils. Il tend aussi à fournir au lecteur « un point de vue plus large, prenant en compte le contexte, c’est-à-dire les facteurs historiques et sociaux liés au marché de l’art comme aux questions plus vastes de l’urbanisme et de la prospérité matérielle qu’incarnait Anvers ».

Parmi les thèmes abordés figurent le foisonnement artistique et économique d’Anvers, sa situation au cœur d’un marché artistique européen, l’activité d’imprimeur-éditeur de Jérôme Cock, lequel diffusa l’œuvre de Bruegel. Mais aussi les productions de ses contemporains tels Frans Floris, Pieter Aertsen ou Joachim Beuckelaer, ou encore la révolte des gueux qui secoua les Pays-Bas et entraîna un mouvement iconoclaste. Les nombreuses reproductions font la part belle à l’œuvre graphique de Bruegel et révèlent les détails de ses peintures, à l’exemple de La Chute des anges rebelles, Le Triomphe de la Mort (tous deux datés de 1562), La Danse de la mariée en plein air (1566), ou Le Portement de croix (1564). Sans oublier Le Vin de la Saint-Martin (fin des années 1560) dont la redécouverte en 2010 a créé l’événement. Exposée jusqu’au 25 mars au Musée du Prado, à Madrid, la toile est ici reproduite dans son état avant restauration, et constitue donc un témoignage précieux pour les futurs historiens de l’art qui s’attaqueront, à nouveau, au fascinant Bruegel.

Larry Silver, Bruegel, éd. Citadelles & Mazenod, 2011, 460 p., 184 €, ISBN 978-2-85088-118-3.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°363 du 17 février 2012, avec le titre suivant : Larry Silver, « Bruegel »

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