Pays-Bas

Le second souffle de l’artisanat

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 19 septembre 2011 - 533 mots

Les designers, de plus en plus nombreux, qui revisitent les techniques ancestrales, sont accueillis au Zuiderzee Museum, à Enkhuizen.

Fort de multiples expériences décevantes, le visiteur redoute souvent d’entrer dans un musée siglé « arts et traditions populaires ». Les exceptions existent néanmoins. Le Zuiderzee Museum d’Enkhuizen, aux Pays-Bas, en est une. Parmi les nombreuses présentations de qualité que l’institution accueille actuellement, figure « Objets industriels/Artefacts, l’évolution de l’artisanat ». Déployée sur trois niveaux de ce vaste musée et mise en scène par deux commissaires en vogue, l’architecte Rianne Makkink et le designer Jurgen Bey (Studio Makkink & Bey, Rotterdam), elle rassemble une série de travaux actuels de designers internationaux – dans le domaine de l’objet, du mobilier, de la mode, de la joaillerie, de l’art de la table… –  montrant comment l’artisanat a évolué et comment il influence le design contemporain et les processus industriels. La scénographie, sorte de jeu de construction fait de planches brutes, met efficacement en valeur les objets historiques – outils du cordier, du potier ou du chaudronnier ainsi que leurs réalisations… – et les pièces actuelles.

Métiers ancestraux
De manière subtile, le tandem néerlandais Nadine Sterk et Lonny van Ryswyck (Atelier NL) évoque l’ancrage dans cette région de Zuidersee, la « mer du Sud », à travers un projet intitulé Polder Ceramics. Ces créatrices ont ainsi réalisé une série de céramiques à partir d’une terre glaise tirée d’un polder créé dans les années 1930, montrant la variété de nuances que l’on peut tirer d’un seul et même site. Ces dernières années, l’attention des designers s’est beaucoup portée sur les processus de conception et de fabrication. Dans une attitude non dénuée d’humour, l’Allemand Mark Braun a fabriqué une série de meubles d’appoint avec une machine baptisée Lift. Cette dernière imite la technique du rotomoulage industriel, sauf qu’elle se manœuvre… à la main, « à l’ancienne ». À l’instar des micro-entreprises artisanales du passé, nombre de designers ouvrent aujourd’hui des ateliers qui sont des industries à petite échelle, dans lesquelles ils élaborent du « sur-mesure ». L’Artisan électronique de Tim Knapen (associé à l’agence Unfold) est une sorte d’imprimante en 3D : il suffit que le robot visualise le dessin d’un objet pour qu’il le fabrique aussitôt en volume, par couches successives de terre, grâce à un tour numérique.

Le plus étonnant est de découvrir les déclinaisons contemporaines de certains processus ancestraux. Ainsi, le métier à tisser du duo viennois Katharina Mischer et Thomas Traxler (studio Mischer’Traxler) est alimenté par des panneaux solaires, tandis que la machine à tricoter Wind Knitting Factory de la Londonienne Merel Karhof utilise des pales de ventilateur et l’énergie du vent pour fabriquer des écharpes de laine. De son côté, le tandem anglo-batave Studio Glithero revisite, avec Blueware, l’impression sur céramique, usant sur la surface de ses vases de produits photosensitifs qui font ressortir, une fois exposés aux UV, divers pochoirs avec une précision extrême.

Les techniques traditionnelles, certes réinterprétées, ont encore de beaux jours devant elles. Les évoquer en les replaçant dans une perspective contemporaine est une façon assurément intelligente de ne pas les enterrer.

INDUSTRIOUS ARTEFACTS

jusqu’au 12 février 2012, Zuiderzee Museum, Wierdijk 12-22, Enkhuizen, Pays-Bas, tél. 31 228 351 111, www.zuiderzeemuseum.nl, tlj 10h-17h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°353 du 23 septembre 2011, avec le titre suivant : Le second souffle de l’artisanat

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