Manifestations

Designer’s Days contre Paris Design Week

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 5 juillet 2011 - 766 mots

Jusqu’alors principal événement dédié au design, les Designer’s Days devront affronter une nouvelle concurrence en septembre.

PARIS - Dans le monde du design parisien, les coïncidences de calendrier sont rarement anodines. Ce jeudi 23 juin, alors que l’association Designer’s Days diffusait le bilan de son édition 2011, qui vient de se dérouler dans la capitale du 16 au 20 juin, elle se faisait, ce même jour, voler aussitôt la vedette par une ex-partenaire, la Safi. Cette filiale à parts égales des Ateliers d’art de France et de Reed Expositions France, organisatrice du salon Maison & Objet, a lancé en grande pompe, lors d’un raout organisé dans le nouveau restaurant de l’Opéra de Paris la première « Paris Design Week », qui aura lieu du 12 au 18 septembre prochain. 
L’équation est des plus simples : y a-t-il de la place, à Paris, pour deux manifestations quasi identiques par an, sachant qu’elles sont toutes deux pour une bonne part fondées sur une forte participation des multiples show-rooms parisiens diffusant du mobilier et des objets ? Rien n’est moins sûr… 

Cent événements en vue
D’un côté donc, les « Designer’s Days », une association dont le budget annuel varie entre 300 000 et 350 000 euros et qui organise, depuis 2001, une manifestation annuelle impliquant show-rooms, magasins, galeries et musées de la ville. Le dernier opus a ainsi proposé soixante-treize « étapes », dont un vaste focus sur le design israélien. Elle a aussi distribué ses traditionnels « Prix » aux acteurs du design international : à une personnalité pour la promotion du design ; à une autre personnalité pour la diffusion du design ; à un produit illustrant une parfaite relation entre une entreprise et un designer, etc. De l’autre côté, la Safi annonce avoir déjà obtenu l’accord, pour cette première « Paris Design Week », de quelque soixante-dix partenaires – éditeurs, designers, architectes, galeries mais aussi hôtel, restaurant, voire grand magasin… Elle espère, d’ici à septembre, franchir la barre des cent événements : défilé de mode le 15 septembre aux Galeries Lafayette ; ouverture au public de l’agence d’architecture de Jean Nouvel ; exposition de designers à Dock en Seine, la Cité de la mode et du design… Pour mémoire : le salon phare de la Safi, Maison & Objet, est aujourd’hui le premier salon professionnel de décoration au monde, rassemblant, deux fois par an, en janvier et en septembre, quelque 85 000 visiteurs, parmi lesquels 46 % d’étrangers. David contre Goliath ? 

Appellation « abusive »
Comble de bisbilles, la Mairie de Paris, qui soutient financièrement les Designer’s Days ne veut, pour l’heure, être mêlée à cette première « Paris Design Week ». Lyne Cohen-Solal, adjointe au Maire de Paris chargée du commerce, de l’artisanat, des professions indépendantes et des métiers d’art, a d’ailleurs signé un chaleureux « Éditorial » pour l’édition des Designer’s Days qui vient de s’achever. Dans un courrier diffusé en avril, elle s’étonne même que le vocable « Paris » soit utilisé comme label à cette nouvelle manifestation : « La Ville de Paris ne saurait tolérer un usage abusif de son nom pour le profit de quelques-uns, aussi tient-elle à spécifier clairement qu’elle n’avait rien à voir de près ni de loin avec la marque “Paris Design Week” ». Précisant : « La Mairie de Paris se réserve le droit de labelliser, avec son nom et sa marque, les manifestations qu’elle juge intéressantes et qui s’inscrivent dans la politique municipale mise en place pour la promotion du design et des entreprises de création. En l’espèce, elle considère que cette appellation se trouve abusivement utilisée ». Dont acte. Si les Designer’s Days avaient pour ambition de se placer sur un plan culturel – les show-rooms invitant des designers à concevoir spécialement pour l’occasion des scénographies autour d’un thème choisi –, la nouvelle « Paris Design Week » s’affiche, elle, strictement commerciale. « 40 % du chiffre d’affaires des boutiques est réalisé entre octobre et décembre, explique Étienne Cochet, directeur général de la Safi. Nous voulons donc prolonger la saison commerciale. D’autant qu’à la mi-septembre, après les grandes vacances, nombre d’étrangers propriétaires à Paris sont présents dans la capitale et, ne l’oublions pas, ces gens ont évidemment un pouvoir d’achat énorme ! » 

Il ne faut pas se leurrer. Face à de tels arguments, les marques et autres distributeurs ne devraient pas réfléchir longtemps. D’autant que certains, lors des Designer’s Days, commençaient à renâcler devant l’invitation à vider leurs show-rooms pour y accueillir une scénographie peu susceptible de faire grimper le chiffre d’affaires.L’avenir dira s’il y a effectivement de la place pour deux… ou pas. 

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°351 du 8 juillet 2011, avec le titre suivant : Designer’s Days contre Paris Design Week

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