Art Basel s’éloigne de Venise

La « bronca » des refusés

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 8 juin 2011 - 716 mots

Alors que la foire de Bâle poursuit son expansion à Hongkong, sa 42e édition suisse doit surmonter un décalage de dates avec l’ouverture de la Biennale de Venise. Elle affronte également la grogne des refusés qui n’hésitent plus à s’exprimer. Les galeries françaises s’efforcent de tenir leur rang.

Cela bouge du côté de la foire de Bâle, qui se tient du 15 au 19 juin. Depuis le lancement de la bouture Art Basel Miami Beach en 2002, le vénérable salon n’avait pas connu de révolution, si ce n’est la création de nouveaux secteurs, parfois simplement rebaptisés. Or, en 2011, deux événements viennent le secouer. Tout d’abord, son organisateur, Messe Schweiz, est devenu le principal actionnaire, à hauteur de 60 %, de la foire de Hongkong Art HK, ce qui lui permet de développer une stratégie tripartite, entre l’Europe, l’Amérique et l’Asie. Ensuite, pour la première fois, Art Basel ne talonne pas la Biennale de Venise, qui débute le 4 juin. Si ce décalage ne pénalise pas les collectionneurs européens, les Américains devront trancher entre l’inauguration de Venise et celle de Bâle, ou dans le meilleur des cas, prolonger leur séjour sur le vieux continent pour prendre part aux deux rendez-vous.

Mais Art Basel a surtout dû affronter la bronca des refusés. Jusqu’à présent, les galeries exclues affichaient un profil bas dans l’espoir d’être acceptées l’année suivante. Mais cette fois, le comité de sélection s’est attaqué à de fortes têtes, capables d’ameuter les médias. C’est le cas d’Eigen Art (Berlin), défenseur de l’école de peinture de Leipzig et premier marchand de l’artiste Neo Rauch. L’absence de Giti Nourbakhsch (Berlin), dont trois artistes figurent à la Biennale de Venise, n’est pas moins étonnante. « En général, j’aurais accepté la décision de Bâle si elle avait été objective et si le jury avait été international. Mais, dans la mesure où j’ai connu des difficultés personnelles avec les membres berlinois du comité, qui sont également au conseil du Gallery Weekend, à Berlin, je me pose des questions », indique la galeriste. Matthias Arndt (Berlin), qui avait déjà été débouté en 2010, ne comprend pas plus que l’exposition personnelle de Thomas Hirschhorn qu’il a proposée n’ait pas été acceptée alors que cet artiste représente la Suisse à la Biennale de Venise. « J’étais pendant douze ans sur la foire la plus exclusive, et maintenant je suis sur sa liste d’attente, qui n’est pas moins exclusive, où je retrouve par exemple une très bonne galerie de New York, James Cohan », ironise l’intéressé.

Ce couperet soulève la question de l’impartialité d’un comité dont trois des membres – Tim Neuger, Claes Nordenhake et Jochen Meyer – sont berlinois. « Le comité de sélection devrait être professionnel et non provincial, il faudrait une galerie américaine et une chinoise. Art Basel doit savoir si elle veut être internationale ou non », tranche Harry Lybke, fondateur d’Eigen Art. Pour Marc Spiegler, codirecteur de la foire, le « conclave » doit être plutôt européen, car une galerie américaine pourrait difficilement planifier vingt-cinq jours de réunion annuels en Europe. Pourtant le New-Yorkais Miguel Abreu figure bien dans le comité de sélection de la section « Art Statements » … « Le système fonctionne et nous ne pensons pas qu’il faille le repenser. Au final, la foire sera jugée sur la qualité de ceux qui sont là, et ce sera une très bonne édition, affirme Marc Spiegler. Tout le monde veut un renouvellement des exposants, mais, pour cela, il faut faire de la place. »   

Retours en grâce
L’exclusion de certains ouvre la voie à d’autres. Andrée Sfeir-Semler (Hambourg, Beyrouth), qui avait exposé de 1989 à 2003, revient avec des œuvres de Walid Raad, Akram Zaatari et Hassan Sharif. Autre retour, celui de Marc Blondeau (Genève), qui fut dans les années 1990 le premier consultant à avoir ses entrées sur le salon. « La clientèle qui arrive sur le marché est captée par les foires et non par les galeries ou les bureaux de conseil. Il faut tenir compte de cette réalité », remarque-t-il en présentant des pièces de Louise Lawler, Martin Kippenberger ou Albert Oehlen. 

ART BASEL

Directeurs : Annette Schönholzer et Marc Spiegler

Nombre d’exposants : 300

Tarif des stands : 560 francs suisses (450 €) le mètre carré

Nombre de visiteurs en 2010 : 62 500

Art Basel

Du 15 au 19 juin, Messe Basel halls 1 et 2, Messeplatz, Bâle (Suisse), www.artbasel.com, tlj 11h-19h

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°349 du 10 juin 2011, avec le titre suivant : Art Basel s’éloigne de Venise

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