Démence créative

Au LaM, une rétrospective dédiée à Adolf Wölfli présente un art sans commune mesure

Le Journal des Arts

Le 7 juin 2011 - 345 mots

VILLENEUVE D'ASCQ - Esprit exubérant, Adolf Wölfli (1864-1930) est à l’origine d’une œuvre gigantesque et absolue, exposée jusqu’au 3 juillet au LaM, à Villeneuve d’Ascq (Nord), en collaboration avec la Fondation Wölfli du Musée des beaux-arts de Berne.

Classée « exposition d’intérêt national » par le ministère de la Culture, cette première rétrospective française retrace l’univers tourmenté d’un artiste en dehors de tout système classique d’interprétation. À partir d’une fiction autobiographique de 25 000 pages, le Suisse, interné dès 1895 à l’hôpital psychiatrique de la Waldau à Berne, édifie une œuvre d’art total, où abondance, engorgement et interdisciplinarité règnent en maîtres.
L’imbrication de dessins, collages, compositions musicales et écritures poétiques construit une résonance réciproque entre les arts. L’insertion narrative complète et explicite un ordre graphique stable et cloisonné, lui-même cadré par l’invasion des partitions musicales. L’enchevêtrement des techniques est manifeste dans l’exposition, non seulement par la pluridisciplinarité des auteurs du catalogue, qui offrent une diversité de point de vue sur cette œuvre polymorphe, mais aussi grâce à une scénographie originale. 

La réclusion au sein d’un univers psychiatrique se dessine tout au long de la visite par l’ambiance hypnotique que procurent les sons violents et répétitifs de ses compositions, et par ses pages de journaux – seul médium disponible à la Waldau – envahis par le carbone, ne laissant aucune marge de manœuvre au vide, au repos. En ne se souciant d’aucune esthétique reconnue, Wölfli puise ses motifs floraux dans la culture populaire. En analysant le lien entre art et thérapie, entre création et folie, des artistes tels André Breton, Jean Dubuffet ou Rainer Maria Rilke ont très vite reconnu l’œuvre de Wölfli. Avec cette rétrospective, l’ambition du LaM est de changer le regard sur les créations d’art brut et d’intégrer Wölfli au sein du système des beaux-arts, en tant qu’artiste à part entière. 

ADOLF WÖLFLI

Commissariat : Daniel Baumann, directeur de la Fondation Wölfli, à Berne ; Savine Faupin, conservatrice en charge de la collection d’art brut au LaM ; Christophe Boulanger, attaché de conservation au LaM

Scénographie : Laurence Fontaine

Nombre d’œuvres : env. 160

Adolf Wölfi Univers

Jusqu’au 3 juillet, LaM, Lille métropole, Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, 1, allée du Musée, 59650 Villeneuve d’Ascq, tél. 03 20 19 68 88, www.musee-lam.fr, tlj sauf lundi 10h-18h. Catalogue, éd. LaM, 292 p., 26 €, ISBN 978-2-8696-1150-4

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°349 du 10 juin 2011, avec le titre suivant : Démence créative

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque