Rites

Étranges Dogons

Le Quai Branly renouvelle le regard porté sur la culture des Dogons

Le Journal des Arts

Le 26 avril 2011 - 431 mots

PARIS - Étudiée par l’ethnologie française dès 1904 grâce à Louis Desplagnes, puis trente ans plus tard par l’expédition Dakar-Djibouti de Marcel Griaule, la culture dogon est aujourd’hui mise en lumière au Musée du quai Branly, à Paris.

Depuis la première exposition parisienne de 1933 au Musée d’ethnographie du Trocadéro, qui faisait état des découvertes d’alors, seule une rétrospective en 1994 au Musée Dapper avait été consacrée aux cultures successives, qui occupèrent pendant dix siècles les falaises du Bandiagara, au Mali. Aujourd’hui, sous le titre laconique de « Dogon », ce sont près de 350 pièces (à la fois statuaire, masques de cérémonie, peintures rupestres, art du métal et objets du quotidien) que l’exposition du Quai Branly réunit afin d’éclairer l’histoire, la cosmogonie et la production artistique dogon.

Tel un palimpseste, le territoire dogon se présente comme un carrefour d’influences culturelles, de dialogues religieux et d’échanges stylistiques. Au cours des vagues de migrations successives s’est construite une culture singulière aux mythes et à l’iconographie unifiés. 

Société matriarcale
La figure exceptionnelle de Djennenké, acquise par l’État français en 2002, datée du Xe siècle, synthétise les grands thèmes de l’esthétique dogon. L’hermaphrodisme constitue l’expression de l’idéale perfection dans la réunion des deux sexes et d’une société où le matriarcat est roi. La tension des bras levés est une métaphore du lien unissant les hommes à la divinité céleste dans l’appel passionné à la pluie. La stylisation géométrique de ce corps, comme taillé au couteau, reflète l’élan mystique vers les ancêtres vénérés. Ces motifs magico-religieux se retrouvent exécutés avec la même puissance, tant sur les effigies rituelles que sur les objets usuels présentés en dernière partie de l’exposition.

Si la mise en espace de ces œuvres rend souvent difficile leur contemplation à cause d’un éclairage ténébreux, d’un accrochage parfois excessivement élevé et de vitrines démesurées, leur présentation selon la culture d’origine offre un aperçu brillant de la cohérence plastique et du fond animiste commun de l’ensemble de cette production artistique. La commissaire de la manifestation, Hélène Leloup, est une femme de terrain, qui a conduit de nombreuses expéditions en territoire dogon. Galeriste, elle a aussi contribué à dynamiser le marché de l’art africain. Son réseau lui a permis d’obtenir de nombreux prêts privés internationaux, qui viennent construire une exposition pléthorique, tel un bel hommage à l’originalité historique et au génie artistique du pays dogon.

DOGON

Commissariat : Hélène Leloup, historienne de l’art
 
Nombre d’œuvres : environ 350

Itinérance : Kunst- und Ausstellungshalle de Bonn, du 14 octobre 2011 au 22 janvier 2012 ; puis Palazzo Reale de Milan, du 21 février au 3 juin 2012

DOGON

Jusqu’au 24 juillet, Musée du quai Branly, 37, quai Branly, 75007 Paris, tél. 01 56 61 70 00, www.quaibranly.fr, tlj sauf lundi 11h-19h, jeudi, vendredi et samedi jusqu’à 21h. Catalogue, coéd. Musée du quai Branly et Somogy éditions d’art, 415 p., 39 euros, ISBN 978-2-7572-0403-0

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°346 du 29 avril 2011, avec le titre suivant : Étranges Dogons

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