Archéologie - Musée

Bavay sur la bonne voie

Le Musée de Bavay dévoile l’art et la science du voyage au nord de l’Empire romain

Par Julie Portier · Le Journal des Arts

Le 28 février 2011 - 651 mots

BAVAY

BAVAY - Le patrimoine archéologique de l’Empire romain n’est pas l’exclusivité du Bassin méditerranéen. Avec l’exposition « Il était une voie », le Musée-site archéologique départemental de Bavay (Nord) met en lumière les richesses archéologiques du Nord de l’Europe en commençant par une leçon de géographie.

Aux confins septentrionaux de l’Empire romain, la Gaule, la Belgique et la Germanie n’en sont pas moins des territoires clés desservis par les 120 000 km de routes qui quadrillent l’Empire, et dont sept se croisent à Bavay même. En avril (les 23, 24 et 25) elles refleuriront ainsi que le souvenir de ce prestigieux héritage lors d’une grande reconstitution historique organisée dans le cadre d’un programme « Interreg » entre le site de Bavay et ceux d’Ath, Aubechies et Velzeke en Belgique. L’événement transfrontalier traduit la ferme volonté des sites archéologiques de reconquérir le grand public. C’est aussi la mission que s’est donnée le Musée de Bavay soutenu par la politique culturelle engagée du département du Nord, signant une exposition qui synthétise et vulgarise les recherches de diverses natures dont les voies romaines ont été l’objet. Les panneaux explicatifs et les quelque 100 objets (datant du Ier au IIIe siècle) provenant d’une vingtaine de musées dessinent un petit parcours pour tout savoir sur ces routes, de leur fabrication à leurs usages, et mesurer leur rôle stratégique, administratif, commercial, mais aussi culturel. 

Facture remarquable
Ces routes, qui, toutes, mènent à Rome, sont le théâtre du syncrétisme, comme le montre une charmante vitrine où voisinent des statuettes de Mercure (comme celle retrouvée sous la basilique de Bavay, lire l’encadré) et des représentations d’Épona, divinité gauloise protectrice des chevaux, figurée en amazone sur sa monture, qui est entrée au panthéon romain. Au-delà du génie technique et de la modernité administrative des Romains qui ne cessent de surprendre leurs descendants, l’exposition traduit une véritable culture du voyage. Elle s’exprime, par exemple, dans le soin apporté aux décors des pièces d’harnachement, un raffinement qui se retrouve sur la surprenante stèle d’Arcon (conservée au Musée national d’histoire et d’art du Luxembourg) représentant en bas-relief deux profils de chevaux attelés à hauteur d’une borne milliaire, ancêtre du panneau signalétique.

En face, la « stèle des voyageurs », provenant des mêmes réserves, montre, dans une facture tout aussi remarquable, deux hommes de deux âges penchés sur un livre, telle l’illustration du voyage initiatique – à moins qu’ils ne consultent la carte détaillée de l’Empire dont une ultime copie sur parchemin datant du XVe siècle, la Table de Peutinger, est conservée à la bibliothèque de Vienne (Autriche). Tout l’art et la science du voyage à la romaine est contenu dans ce document exceptionnel, qui figure minutieusement chaque ville de l’Empire romain, de la façade atlantique à l’Asie Mineure, et dont Bavay montre une reproduction. 

Le forum romain de Bavay restauré

Plus grand forum mis au jour dans le nord-ouest de l’Empire romain, Bavay était sans doute l’une des vitrines septentrionales de la grandeur de Rome. Le site est aujourd’hui un emblème de sauvetage dans le cadre du transfert de propriété des monuments historiques. Acquéreur en 2008, le conseil général a mené depuis lors une vaste campagne de restauration, qui aura bientôt vaincu la végétation sous laquelle avait presque disparu la muraille du Bas-Empire et consolidé les piliers du remarquable cryptoportique datant des Ier et IIe siècles. La configuration du site est depuis peu rendue plus lisible grâce à l’apport de gravillons de différentes teintes qui permettent de distinguer l’emplacement des rues, des soixante boutiques du forum ou des bureaux administratifs. Cette mission d’urgence, pour sécuriser et consolider le site en sérieuse décrépitude sous le climat nordique, s’accompagne d’une politique de communication et de publication des fouilles menées intensément depuis les années 1990 sur le forum découvert en 1945. Il faudra maintenant attendre le réaménagement des voiries qui bordent l’ancienne basilique, pour que cette dernière bénéficie des mêmes soins que le reste du site.

IL ÉTAIT UNE VOIE, ITINÉRAIRES ANTIQUES AU NORD DE L’EMPIRE ROMAIN

Commissariat : Isabelle Bollard-Raineau, responsable du service de recherche et conservation du Musée-site archéologique départemental de Bavay, en collaboration avec le Musée des thermes de Heerlen (Pays-Bas)

Nombre d’objets : environ 100

Reconstitution : « Via romana, une légion en marche sur la voie Bavay-Velzeke » du 23 au 25 avril

Jusqu’au 30 août
Musée-site archéologique départemental de Bavay, 2, rue des Gommeries, 59570 Bavay, tél. 03 27 63 13 95, tlj sauf mercredi et samedi matin 9h-18h, week-end 10h30-12h30 et 14h-18h. Catalogue à paraître.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°342 du 4 mars 2011, avec le titre suivant : Bavay sur la bonne voie

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