Arts d’Asie

La Chine s’enflamme

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 5 janvier 2011 - 775 mots

Porcelaines, bronzes dorés, jades, cloisonnés et cornes ont été emportés à des prix fous par des Chinois.

PARIS - Plus de 32 millions d’euros d’objets d’art chinois (estimés au mieux 14 millions d’euros) ont été achetés du 14 au 16 décembre, en ventes publiques à Paris, majoritairement par des enchérisseurs asiatiques. Estimé un million d’euros à Drouot chez Piasa, un rare vase impérial chinois de la famille rose, d’époque et de marque Yongzheng (1723-1735), s’est envolé à 5,5 millions d’euros, la meilleure enchère de l’année à Drouot. Ce seul lot représente à lui tout seul 74 % de la vente en valeur. Les Asiatiques, venus nombreux dans la salle, ont aussi emporté une corne de rhinocéros du XVIIe, sculptée en haut-relief et estimée 25 000 euros, pour 155 440 euros. Les coupes libatoires des dynasties Ming et Qing, en corne de rhinocéros sculptée, suscitent beaucoup l’enthousiasme des collectionneurs chinois. Trois autres ont fait le triple de leur estimation : une corne sculptée en forme de feuille de lotus est partie à 228 750 euros chez Sotheby’s et une autre a été emportée pour 145 000 euros chez Christie’s, tandis qu’une troisième, toujours chez Christie’s, était adjugée 181 000 euros à un rare amateur français lancé dans la compétition. Toutes ces cornes avaient une provenance solide, écartant tout risque de faux qui sont légion sur le marché. 

Pas de succès pour les pièces de goût oriental
Une traçabilité sans faille et une provenance impériale (couplée parfois à un pedigree européen) forment le cocktail idéal en vente publique, surtout dans des domaines en perte de vitesse comme celui des jades ou des cloisonnés, dans lesquels Christie’s s’est particulièrement illustré. Notons une enchère record de 3,3 millions d’euros pour un pot à pinceaux en jade (estimé 150 000 euros), provenant d’une vieille collection française (Charles Gaillard de Blairville, ingénieur militaire en poste en Chine de 1859 à 1862), daté prudemment du XVIIIe-XIXe siècle, mais remontant vraisemblablement au XVIIe siècle d’après de fins connaisseurs. Toujours chez Christie’s, un marchand asiatique est allé jusqu’à 3,2 millions d’euros pour acquérir une rare paire de boîtes en émaux cloisonnés et champlevés de la dynastie Qing (1792-1868), entrée dans la collection du baron James de Rothschild au XIXe siècle et estimée au mieux 300 000 euros. Les 39 % d’invendus portaient sur des objets de moindre valeur à l’instar de petits jades ainsi que sur les pièces de goût occidental : porcelaines d’exportation, terres cuites chinoises et statuaire asiatique en pierre. Cette dernière catégorie a particulièrement pâti de l’absence de la clientèle américaine, ce qui a permis au Musée Guimet, à Paris, d’acheter à moindre frais (44 200 euros) une superbe tête de Guanyin en calcaire gris de la dynastie Qi du Nord (550-577). Au final, 65 % d’acheteurs asiatiques ont été enregistrés, pesant sur 90 % de la vente en valeur, avec une forte proportion de Chinois de Chine populaire (35 % des acquéreurs pour 75 % de la vente en valeur). Chez Sotheby’s, on a observé 23 % d’acheteurs de Chine populaire, 16 % de Hongkong et 14 % de Taiwan, correspondant à 73 % de la vente en valeur. Les deux plus hautes enchères de 1,3 et 1,1 million d’euros ont récompensé deux rarissimes sculptures d’Ajita et de Cudapanthaka en bronze doré, du XVe-XVIe siècle, provenant d’une collection particulière européenne. « Issus à l’origine d’une série de seize, ces Arhats étaient placés dans le même sanctuaire à l’est et à l’ouest du Bouddha Shakyamuni dont ils étaient les disciples. Désormais, sept sont localisés et neuf restent encore à découvrir », commente l’expert Philippe Delalande. La vente a aussi été marquée par des prix forts pour la porcelaine chinoise, à l’exemple d’un Tankard impérial en porcelaine bleu blanc, de marque et d’époque Xuande (1426-1435), estimé 150 000 euros et parti à 912 750 euros. « C’est un prix fou pour cette pièce, certes belle, mais d’un bleu un peu pâle, et comportant quelques craquelures sous la base », note l’expert. En revanche, la porcelaine d’exportation et une série de pièces du Japon et du Viêt-nam n’ont pas rencontré de succès.

ART D’ASIE SVV PIASA, 14 DÉCEMBRE
Estimation : 2 à 2,5 millions d’euros
Résultats : 7,4 millions d’euros
Nombre de lots vendus/invendus : 304/100
Pourcentage de lots vendus : 75 %

ART D’ASIE CHRISTIE’S, 15 DÉCEMBRE
Estimation : 3,8 à 5,2 millions d’euros
Résultats : 12,7 millions d’euros
Nombre de lots vendus/invendus : 237/151
Pourcentage de lots vendus : 61 %
 
ART D’ASIE SOTHEBY’S, 16 DÉCEMBRE
Estimation : 5,2 à 7,3 millions d’euros
Résultats : 12,6 millions d’euros
Nombre de lots vendus/invendus : 256/150
Pourcentage de lots vendus : 63 %

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°338 du 7 janvier 2011, avec le titre suivant : La Chine s’enflamme

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