Focus : Honoré Daumier - « L’Artiste en face de son œuvre »

Vente du 13 décembre à Drouot, Paris - SVV Camard

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 4 janvier 2011 - 511 mots

Cette œuvre qui, de prime abord, ressemble à un dessin, se révèle être une toile peinte de grand format d’Honoré Daumier.

La peinture est non signée, mais d’une provenance irréprochable remontant au XIXe siècle. Elle était conservée dans son cadre d’origine en acajou, masquant la numérotation de sa mise au carreau. Elle a autant plu aux amateurs de tableaux qu’aux collectionneurs de dessins qui ont bataillé pour l’acquérir. Inédit en vente publique et encore jamais exposé, ce tableau a été adjugé un million d’euros, le 13 décembre 2010 à Drouot par la maison Camard. Il s’agit du troisième plus haut prix aux enchères pour Daumier.
Cette œuvre est répertoriée dans le catalogue raisonné de l’artiste rédigé par K. E. Maison et publié en 1968, soit la référence pour Daumier. L’ouvrage rappelle que cette peinture a été « laissée par l’artiste dans un état inachevé appelé « toile au trait ». Elle a été transférée sur toile par le biais du lavis portant le même titre (D 367) de la collection David-Weill à Paris. La mise au carreau est clairement visible sur la toile. Stylistiquement et techniquement, la toile est très proche de la version inachevée du Wagon de troisième classe (I-165) se trouvant au New York Metropolitan Museum of Art, et est une nouvelle preuve tout aussi importante de la méthode de Daumier ». 

Puissant trait noir 
En charge du département Tableaux chez Camard, Annie Bès a aussi fait le rapprochement avec d’autres toiles répertoriées dans le catalogue raisonné de Daumier (reproduites dans les planches 100 à 103), où le peintre s’est mis en scène dans son atelier dans des attitudes différentes : « On y retrouve le chevalet et l’artiste cette fois-ci en plein travail, et non pas en réflexion comme dans notre tableau. Dans notre œuvre, il existe une fenêtre qui projette une ombre que nous ne retrouvons pas dans les œuvres citées en référence : la verrière a disparu et la lumière y est suggérée par un contour lumineux de la silhouette de l’artiste. » Durant l’exposition avant la vente, beaucoup de visiteurs admiratifs ont pu constater que ce tableau, par son puissant trait noir cernant les volumes et ses grandes dimensions (117 x 92 cm), avait une présence extraordinaire, bien plus que ne le laissait supposer la simple reproduction de son image au catalogue, preuve qu’il faut souvent aller à la rencontre des œuvres pour les apprécier à leur juste valeur. « Ce tableau permet de comprendre que Daumier est un fantastique dessinateur, confirme Bertrand Gautier, marchand parisien spécialiste du XIXe. C’est un chef-d’œuvre qui joue sur le côté réflexif du sujet : le regard du peintre, représenté nu, devant son œuvre. En fait, c’est l’artiste face à la Vérité nue. L’impression que laisse cette œuvre profonde est d’autant plus forte que son format est important. »

Honoré Daumier (1808-1879)

Titre : L’Artiste en face de son œuvre
Date d’exécution : vers 1863-1867
Technique : huile sur toile
Dimensions : 117 x 92 cm
Provenance : galerie Brame, collection Boy, puis collection Maurice Pereire (Paris)
Estimation : 250 000 euros
Adjudication : 1 million d’euros

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°338 du 7 janvier 2011, avec le titre suivant : Focus : Honoré Daumier - « L’Artiste en face de son œuvre »

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