Galerie

Rétrospective

Tout Herbin

La galerie Lahumière, à Paris, rend hommage à l’artiste héraut de la peinture pure

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2010 - 488 mots

PARIS

PARIS - Sans en avoir l’air, l’exposition composée d’une trentaine d’œuvres d’Auguste Herbin à la Galerie Lahumière, à Paris, constitue un vrai pied de nez aux institutions françaises, qui, exception faite du Musée de Montbéliard, ne lui ont jamais consacré de rétrospective.

Pour le galeriste Jean-Claude Lahumière, cette réserve tient au « goût immodéré » des Français « pour le récit historique ou intérieur ». Une sensibilité à mille lieues de l’art non figuratif non objectif d’Herbin.
Orchestré sur trois niveaux, le parcours, qu’il convient de commencer par le dernier étage, suit un fil chronologique. Un Paysage nocturne à Lille de 1900 révèle l’influence postimpressionniste, mâtinée d’un expressionnisme hérité de Van Gogh. Peu à peu, les formes se simplifient et se décomposent. Un Paysage aux deux arbres réalisé en 1909 au Bateau-Lavoir montre qu’Herbin ne fut pas un simple suiveur du cubisme, pire, un « petit maître », comme on l’a trop souvent qualifié. Mais sa pratique tient sans doute plus de Léger ou Delaunay que de Picasso. Son cubisme intègre progressivement des aplats colorés traversés de plans pointillistes. Dès le début, Herbin apparaît comme un amoureux de la couleur. En 1910, le collectionneur allemand Henry Simms ne tarit pas d’éloges sur ses « couleurs flamboyantes », son « infinie douceur, une harmonie superbe dans l’arrangement de ces taches fortes et simples ». Pour le critique d’art Waldemar-George, la peinture d’Herbin n’oublie pas les leçons du fauvisme. « Sa couleur agit spontanément. Elle pulvérise la forme », écrit-il. On ne sera nulle- ment surpris qu’à la suite de la donation faite par Herbin au Musée Matisse de Cateau-Cambrésis (Nord), le peintre y côtoie un autre grand coloriste, Henri Matisse. Son engagement dans l’abstraction se précise dans les années 1920-1930, mis en exergue au deuxième étage de la Galerie Lahumière. Comme d’autres, Herbin hésite, succombe brièvement à une figuration stylisée avec un Paysage à la maison rouge de 1925, avant de revenir dans les clous. Il suit d’abord une veine organique, à coup de torsades et de volutes comme dans le Petit Bonhomme et l’âne de 1926, puis adopte les leçons du futurisme à travers un chevauchement mouvementé des plans.  

Alphabet plastique
Président en 1936 du groupe Abstraction-Création, Herbin développe six ans plus tard son « Alphabet plastique », tentative de codification des couleurs et des formes géométriques. À chaque lettre sont attribuées une couleur, une forme et même un son, selon un système de correspondance arbitraire. Démonstration de cette équation aussi spirituelle que picturale au rez-de-chaussée de la galerie, dominé par une toile rectangulaire baptisée Vendredi II. Signe que tous les conservateurs français n’ignorent pas Herbin, le pendant de ce tableau est visible jusqu’au 17 janvier 2011 dans l’exposition « Chefs-d’œuvre ? », au Centre Pompidou-Metz.

AUGUSTE HERBIN, UNE RÉTROSPECTIVE,

jusqu’au 30 décembre, Galerie Lahumière, 17, rue du Parc-Royal, 75003 Paris, tél. 01 42 77 27 74, du mardi au vendredi 10h-13h, 14h-18h30, le samedi 11h-13h 14h-18h, www.lahumiere.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°335 du 19 novembre 2010, avec le titre suivant : Tout Herbin

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