Foires : des journalistes aux commandes

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 19 octobre 2010 - 470 mots

Voilà encore quelques années, les patrons de foires recherchaient des directeurs expérimentés ayant déjà fait leurs classes dans d’autres salons.

Le profil requis a évolué. La Foire internationale d’art contemporain (FIAC) a donné le ton en 2004 en engageant une ancienne galeriste, Jennifer Flay, puis un ancien délégué aux Arts plastiques, Martin Bethenod. Ces trois dernières années, une nouvelle catégorie est arrivée aux commandes : les journalistes et critiques d’art. La foire turinoise Artissima a donné le « la » en engageant Andrea Bellini, ancien correspondant de la revue Flash Art à New York. Un autre critique d’art et curateur, Francesco Manacorda, lui a succédé cette année (lire p. 24). Pour remplacer Samuel Keller, la Foire de Bâle avait initialement fait appel à deux journalistes, Marc Spiegler, contributeur d’Art Auction (New York) et de The Art Newspaper (Londres), et Cay Sophie Rabinowitz, transfuge de la revue suisse Parkett, laquelle a très vite jeté l’éponge. De son côté, le Salon du dessin contemporain a fait d’abord appel à Laurent Boudier, de Télérama, avant Philippe Piguet, critique d’art et collaborateur de L’œil. Enfin, Art Dubaï a recruté Antonia Carver, rédactrice en chef adjointe de la revue Bidoun (New York). Pourquoi les salons font-ils de plus en plus appel aux journalistes ? Parce que cette sphère professionnelle possède une vision à la fois panoptique, synthétique et analytique du marché. « En tant que journaliste, vous essayez d’avoir une vue à 360° de ce qui se passe », confirme Antonia Carver. Pour Marc Spiegler, la différence entre son précédent travail et ses fonctions actuelles repose surtout dans l’utilisation des informations. « Lorsque j’écrivais sur le monde de l’art, je devais comprendre quelles étaient les tendances, qui étaient les principaux acteurs, ce dont un artiste avait besoin pour réussir. Dans mon travail actuel, j’ai encore besoin de réfléchir à ces sujets, explique-t-il. En un sens, le travail de collecte des informations n’est pas différent. Ce qui change, c’est la mise en pratique. Avant j’écrivais pour un public ; maintenant, je fais en sorte que ces informations aident les artistes et les exposants d’Art Basel. » Le rapport avec les galeries se modifie quand un journaliste franchit le Rubicon et abandonne sa casaque d’observateur privilégié. Malgré tout, la direction d’une foire se révèle être un très bon tremplin dans une carrière. S’il n’avait pas déployé son charisme à Artissima, Andrea Bellini aurait-il pu prendre la codirection du Castello di Rivoli (Italie) ? Ce d’autant plus que le fonctionnement d’Artissima donne à son directeur une carte blanche artistique totale. « Dans mon contrat, le conseil d’administration n’a aucun mot sur mon programme, précise son successeur Francesco Manacorda. C’est une liberté qu’on a si on s’appelle Daniel Birnbaum et qu’on dirige la Biennale de Venise. À mon âge et à mon niveau de carrière, ce serait impossible. »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°333 du 22 octobre 2010, avec le titre suivant : Foires : des journalistes aux commandes

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