Drouot : les ventes de mars

Le Journal des Arts

Le 1 mars 1994 - 691 mots

Tableaux modernes, tapisseries d’une duchesse, dessins anciens inédits, un autre Canaletto. Me Kohn monte à Paris.

Après un début d’année très lent, Drouot se réveille, enfin, en mars. Me Marc-Arthur Kohn, qui a prêté serment comme commissaire-priseur à Paris le 2 février, après avoir longtemps exercé à Bourg-en-Bresse, démarre en trombe avec pas moins de six ventes ce mois-ci – entre autres, tableaux anciens, haute époque, art italien et armes anciennes.

Le 4 mars, Me Binoche met en vente des tableaux en provenance de l’atelier d’Irena Dedicova, la maîtresse de l’écrivain Milan Kundera. Le peintre était le sujet de son livre "l’Insoutenable Légèreté de l’être". Juliette Binoche, la nièce du commissaire-priseur, a d’ailleurs interprété le rôle de l’artiste au cinéma.

Me Christian de Quay frappe fort à Drout-Montaigne le 9, 10 et 11 mars en mettant en vente 360 lots de tableaux et sculptures modernes, dont deux fusains sur papier de Matisse (1942) estimés entre 500 à 600 000 et entre 300 à 500 000 francs, la Sortie du Moulin Rouge (1909), une huile sur papier marouflé sur toile de Pierre Bonnard (est. 1 à 1,5 million de francs) et le Port de Marseille vers 1899 - 1900 de Henri Edmond Cross, estimé entre 2 et 3 millions de francs.

Une importante vente de tapisseries est prévue le 14 mars : Me Rogeon vend celles du château Rosny, ancienne demeure de la duchesse de Berry.
Les 15, 16 et 17 mars, Mes Oger et Dumont vendent la succession de Monsieur et Madame Grosjean, qui comprend notamment 300 dessins réunis avant et après la seconde guerre mondiale – principalement des études préparatoires et des projets pour des tableaux de maîtres italiens et français du XVIe au XIXe siècle.

Dans sa vente de tableaux anciens, objets d’art et d’ameublement à Drouot-Montaigne, le 18 mars, Me Picard adjuge une très rare pendule, en bronze patiné et marbre vert représentant Robinson Crusoë, époque Directoire, estimation 200 à 300 000 francs, et deux fauteuils en bois plaqué d’érable moucheté, vers 1820-30, estampillés Jacob (est. 600 à 800 000 francs).

Moins conventionnelle et luxuriante
La nature morte de Floris Van Dyck (1575-1651), une huile sur panneau de chêne adjugée le 24 mars par Mes Laurin, Guilloux, Buffetaud et Tailleur, est très rare à cause de son grand format et de son état de conservation, apparemment excellent. Son estimation (3,5 millions de francs) est élevée, mais les œuvres de ce peintre de Haarlem se trouvent très rarement sur le marché. Moins conventionnelle et luxuriante que les natures mortes flamandes plus tardives, celle-ci est exceptionnellement belle.

De grandes toiles aussi à Drout-Montaigne le 25 mars, chez Mes Millon et Robert : notamment les Demoiselles au bord de l’eau (1908), une huile sur toile de Pierre Bonnard estimée entre 5 et 7 millions de francs, et la Seine à Lavacourt (1879) de Claude Monet, estimée entre 3 et 3,5 millions de francs. Vendue à Drouot pour 3,2 millions en 1988, fera-t-elle mieux cette fois-ci ?

Téméraire, Me Tajan ? Après le fort joli coup du Canaletto qu’il a vendu 66 millions de francs à l’Hôtel George V en décembre, le commissaire-priseur rempile le 29 mars à Drouot-Montaigne avec un autre tableau du maître vénitien, Le Pont de Westminster vu par le nord. Estimée entre 10 et 14 millions de francs, la toile date de la période anglaise de l’artiste, entre 1746 et 1750, et semble a priori mal adaptée au marché français. Peuplé de minuscules personnages stéreotypés rendus avec quelques touches de pinceau, ce tableau est moins grand (47 x 77cm) et surtout moins beau que le précédent.

Le même soir, Me Tajan adjuge 38 tableaux flamands, du stock de la galerie Waterman d’Amsterdam, qui vient d’être mise en vente. Quelques-uns, comme la très classique nature morte de Cornelis de Heem estimée entre 1,8 et 2,2 millions de francs, sont excellents. Le vendeur, Victor Waterman, a évidemment estimé que de telles œuvres risquaient d’être noyées dans une vente de tableaux anciens à Londres ou à New York, et comptaient de meilleures chances de trouver preneur à Paris, qui compte davantage de collectionneurs privés habitués à fréquenter les salles de ventes.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°1 du 1 mars 1994, avec le titre suivant : Drouot : les ventes de mars

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