Les Rencontres internationales de la photographie

Un programme ambitieux pour fêter les vingt-cinq ans d’Arles

Trente-quatre expositions, sept soirées de projection

Par Emmanuel Fessy · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1994 - 653 mots

Les Rencontres internationales de la photographie (RIP) d’Arles mettent leurs soucis entre parenthèses et affichent un programme ambitieux pour fêter leur vingt-cinquième édition cet été. Du 7 juillet au 15 août, trente-quatre expositions, cinq soirées de projection au Théâtre antique, deux à l’Archevêché, une trentaine de stages, ainsi que trois colloques doivent prouver qu’Arles reste le premier festival au monde voué à l’image fixe.

PARIS - La manifestation compte sur un budget conséquent de 9,3 millions de francs, supérieur à l’an passé, dont 3,4 millions sont apportés par des crédits publics. Elle mise sur l’attrait que pourra exercer auprès du public cet anniversaire et table sur des recettes propres en forte hausse. Elle conserve le soutien de Kodak, mais l’apport de celui-ci ne représente plus qu’un million de francs, contre 3 en 1992. L’arrivée de nouveaux mécènes, comme la Société civile des auteurs multimédias (Scam), qui verse 230 000 F, ne compense pas le recul du géant de la photographie.

Retour aux sources
Après une succession de directeurs artistiques, Arles a décidé de revenir aux sources. L’un des cofondateurs des RIP, le photographe Lucien Clergue, est chargé de coordonner la programmation de cet anniversaire. Il est assisté par un comité artistique à quatre têtes, Manfred Heiting, responsable de la collection de l’American Express, Yves-Marie Marchand, éditeur, Patrick Roegiers, critique, Robert Pledge, directeur d’agence photo, tandis que l’association des RIP est désormais présidée par le sénateur maire d’Arles, Jean-Pierre Camoin.
Quelques grandes figures, André Kertész, Jacques-Henri Lartigue, Henri Cartier-Bresson, Edward Steichen et Joseph Sudek vont dominer la manifestation. Les deux premiers bénéficieront d’hommages, sous forme d’exposition et de projection. Arles exposera les Distorsions insolites d’André Kertész, série réalisée à la suite d’une commande en 1933. Kertész, qui a peu photographié de nus, s’est amusé à déformer les corps, à jouer avec leur élasticité. Jacques-Henri Lartigue, qui aurait cent ans cette année, n’était pas seulement un grand photographe, mais un touche-à-tout passionné. L’exposition montrera ses dessins, ses peintures, ses écrits, en liaison avec ses photographies. Une soirée de projection évoquera cet "amateur de rêves" à travers son journal intime, et fera revivre les "mémoires hongroises" d’André Kertész.

Un film sur Cartier-Bresson
L’un des événements sera également la projection du premier film où Henri Cartier-Bresson accepte de se montrer, et où il s’implique personnellement. Réalisé par ses amis Sarah Moon et Robert Delpire, ce moyen métrage évoquera toute la carrière de l’artiste, également cinéaste et dessinateur. Quant à Steichen, il sera représenté par quatre-vingts images, issues de la Société royale de photographie, dont une cinquantaine avait été offerte par Steichen, lui-même. Enfin, Arles s’attachera aux années 1950-54 de la production de Joseph Sudek, marquées par des recherches dans les contrastes, et une dramatisation de l’image, accentuée par une technique particulière de tirage.

Lors de la présentation de ce programme, Jean-Pierre Camoin a tenu à assurer que celui-ci ne sera pas "un feu d’artifices". Il n’empêche que peu semble engagé pour assurer la pérennité d’une manifestation qui n’est plus aujourd’hui en situation de monopole, qui ne peut plus être animée au gré de directeurs artistiques désignés trop tard pour investir dans une véritable programmation. Les RIP ont du mal à passer de leur période historique – celle marquée par l’initiative de pionniers dans le domaine – à celle d’un festival devant être géré par des professionnels, tout en conservant l’atmosphère "bon enfant" qui fait l’un des charmes d’Arles. L’un des anciens directeur des RIP, aujourd’hui directeur de Magnum, François Hebel, a été chargé d’une mission d’étude par le ministère de la Culture. Il préconise une pérennité des structures de gestion, l’ouverture vers de "nouveaux opérateurs", la nécessité de créer un "marché de la coproduction" où les professionnels – agences photo, agences de publicité, éditeurs – pourraient confronter leurs projets et collaborer. La photographie étant, selon lui, la seule discipline grand public à être dépourvue de lauriers, il recommande la création d’oscars à Arles, "les Mistrals de la photographie" …

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°3 du 1 mai 1994, avec le titre suivant : Un programme ambitieux pour fêter les vingt-cinq ans d’Arles

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque