Paris : de Brauner à Zvezdochotov

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 1 juillet 1994 - 743 mots

Pour la plupart des galeries, la saison se termine début juillet avec des accrochages réunissant les artistes qui occupent habituellement leurs cimaises. Quelques-unes parmi elles, cependant, cherchent à éviter que leur espace ne ressemble, selon le terme consacré par l’usage, à un simple 'show-room'.

Ainsi la galerie Artcurial (9, avenue Matignon) rend-elle hommage à Michel Tapié jusqu’au 30 juillet, en réunissant des œuvres de Brauner, Butler, Dubuffet, Etienne-Martin, Sam Francis, Hartung, Mathieu, Matta, Michaux, Richier, Riopelle et Ubac. Le célèbre critique les a défendu becs et ongles tout au long de sa carrière, et, à travers eux, une certaine idée de l’abstraction, témoignant d’une rare cohérence dans ses choix que les manuels d’art contemporain saluent volontiers. C’est le vaste thème de la figure qui permet de disposer côte à côte des peintres aussi différents et inégaux que Abakanowicz, Arikha, Auerbach, Bacon, Grooms, Kitaj, Mason ou Valdes à la galerie Marwan Hoss (12, rue d’Alger, jusqu’au 22 juillet). Jean Hélion, que Marwan Hoss à d’ailleurs montré il y a quelques temps, aurait pu être inclu dans cet  juillet). Jean Hélion, que Marwan grammatique. De celui qui sut si bien légitimer son passage de l’abstraction à la figuration, à contre-courant de la mode, on pourra voir un choix d’œuvres à la galerie Pierre Brullé (25, rue de Tournon, jusqu’au 23 juillet).

Si les années cinquante ont été traversées par cette tumultueuse querelle entre tenants de l’informel et lieutenants de la figure, le Pop Art y a, dans une certaine mesure, coupé court, en jetant de nouvelles armes dans la bataille et en contribuant à modifier la perspective, jusque-là européo-centriste, de l’art moderne. Andy Warhol, auquel sa ville natale de Pittsburgh a dédié un immense musée qui vient tout juste de s’ouvrir, est célébré une nouvelle fois à la galerie Thaddeus Ropac (7, rue Debelleyme, jusqu’au 16 juillet). Les effets de cette diabolique machine à peindre que fut Warhol n’ont certainement pas fini de se faire sentir. La peinture a malgré tout survécu au séisme américain de la répétition mécanique. Parmi quelques autres, l’œuvre de Jannis Kounellis, qui ne fait pourtant usage ni de la toile ni du pinceau, montre que tous les moyens sont bons pour poursuivre les métamorphoses de l’espace pictural et en exalter toute la richesse. Preuve en sera de nouveau donnée à la galerie Lelong (13, rue de Téhéran, jusqu’au 13 juillet), avec les travaux récents de l’artiste gréco-italien. Adoptant une facture beaucoup plus classique pour leurs tableaux secrètement lyriques, le Français Olivier Debré et l’Américain Jules Olitski commémorent à la galerie Gérald Piltzer (78, avenue des Champs Élysées, jusqu’au 30 juillet) le cinquantième anniversaire du débarquement.

D’un genre l’autre : Braco Dimitrievic s’est fait connaître par ses gigantesques portraits d’anonymes saisis dans la rue par l’appareil photographique, et auxquels il conférait brusquement un statut de chef d’État en les faisant flotter à la façade des musées. La galerie de France (52, rue de la Verrerie, jusqu’au 30 juillet) présentera pour la première fois, en collaboration avec le musée d’art moderne de Sarajevo, une série de travaux récents de cet artiste volontiers militant. L’art de Markus Raetz, que la galerie Farideh Cadot (77, rue des Archives, jusqu’au 16 juillet) représente fidèlement depuis de longues années, et auquel le musée Rath de Genève consacre actuellement une large exposition rétrospective, joue avec tous les phénomènes optiques qui offrent des solutions poétiques et troublantes. D’un entrelacs de brindilles émerge peu à peu un visage, d’un chapeau surgit, quelques degrés plus loin, un … lapin.  Paul McCarthy est lui un redoutable vidéaste et "performer" de la côte Ouest des États-Unis, qui propose une critique acerbe de la société contemporaine et de sa sous-culture envahissante. On en verra quelques tumultueux extraits à la galerie Georges-Philippe Vallois (38, rue de Seine) jusqu’au 20 juillet.

Léo Delarue est une jeune sculptrice qui, à l’instar de nombre de ses consœurs, privilégie les formes organiques qui répercutent ostensiblement l’écho du corps. La galerie Jorge Alyskewycz (14, rue des Taillandiers) présente ses œuvres jusqu’au 23 juillet. Retour aux expositions collectives avec ces cryptiques "Délits d’initiés" présentés par la galerie Gilbert Brownstone (26, rue Saint-Gilles, jusqu’au 30 juillet) qui rassemblent Absalon, Armleder, Basserode, Frize, Callum Ines, Knoebel, Messager, Unbeg et Barry X Ball. Sous le titre bien plus explicite de "Life is too much", la galerie des Archives (4, impasse Beaubourg) présente quant à elle, et jusqu’à la même date, Art orienté objet, Biefer & Zgraggen, Brey, Quinn, Peterman, Schaerf, Siem et Zvezdochotov.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°5 du 1 juillet 1994, avec le titre suivant : Paris : de Brauner à Zvezdochotov

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