Un tour des galeries

Belgique : D’une fin d’été aux promesses de rentrée

Le Journal des Arts

Le 1 septembre 1994 - 670 mots

Bruxelles retrouvera bientôt ses couleurs de rentrée dans la morosité d’un marché qui, sans connaître d’effondrement, n’a pas retrouvé son réel souffle.

D’où l’intérêt de revenir un instant sur quelques manifestations d’ensemble qui esquissent, peut-être, des horizons nouveaux. À Lasnes, l’International Art Gallery (jusqu’au 10 septembre), sans céder aux effets de mode, a acquis au fil des années une solide réputation dont témoignent ses "expositions tournantes".

Cette année encore, on y aura retrouvé des pièces de qualité signées Zimmerman, Schrobiltgen, Thienpont, Mels, Mondry ou Bram Bogaert, entourées de réalisations récentes de Patricia Kinard ou de Philippe Dupierreux. La galerie innove en accueillant, outre les sculptures d’Elise Delbrassine, un "cabinet-abstrait" qui remonte à l’abstraction de l’immédiate après-guerre avec Delahaut pour se conclure dans les dernières installations de Jean Groenen.

À Anvers, jusqu’au 25 septembre, autre vision d’ensemble au Luc Van Middelem Contemporary and Modern Art. L’abstraction intuitive d’anciens membres de la "jeune peinture belge" comme Mortier, Peire ou Lismonde, celle, plus lyrique, de Van Anderlecht ou de Cobra comme Dotremont, Appel ou Alechinsky, se mêlent à une figuration qui de Spillaert à Ravelle en passant par Permeke n’a pas couru de risque en cherchant à renouveler le panorama proposé.

À Oosteeklo, près de Gand, pour commémorer les quinze ans de sa galerie, William Wauters présente jusqu’au 8 septembre un choix d’artistes qui réunit des valeurs confirmées comme Maurice Wyckaert, Jan Burssens, Camiel Van Breedam ou Marc Mendelson, à de jeunes artistes comme Wim Biewenga dont la figuration fougueuse se singularise, tant par l’acidité des couleurs que par la trivialité d’un trait volontiers provocateur.

Dans le registre des expositions personnelles, quelques-unes méritent une attention particulière. À Stavelot, la galerie Le Triangle Bleu offre, jusqu’au 18 septembre, une exposition d’Antoine Mortier qui permet de retrouver dessins et peintures réalisés entre 1947 et 1987. L’ensemble souligne une évolution cohérente qui, au sortir de la guerre, renonce au principe de représentation sans abandonner la figure humaine désormais inscrite sous forme d’un signe gestuel, progressivement mené vers davantage de dépouillement et de concentration.

On retrouve la même rigueur dans les œuvres récentes de Lismonde que présentera, à partir du 5 septembre, la galerie 2016 à Bruxelles. Lismonde, dont l’œuvre joue du contraste musical des noirs et des blancs en des rythmes architecturés selon des ordonnancements d’humeur, s’était attaché depuis quelques années à la confection de petits formats, dont la minutie dans la gestualité touchait à la préciosité de l’objet rare. Il est revenu ici à de grandes compositions qui laissent parler le fusain dans la tension dynamique des courbes et des droites. À ses côtés, Jean Coquelet présente ses photographies aux lignes sculpturales. Le corps humain est tantôt soumis aux exigences de la construction, tantôt absorbé dans la qualité d’un détail devenu paysage. Coquelet travaille la photographie en sculpteur, Lismonde la lumière en musicien.

La sculpture n’a pas été négligée. À Hamois-en-Condroz, près de Liège, la galerie Espace Partenaire a offert à dix sculpteurs la possibilité de confronter leur approche de la matière. Le résultat est visible jusqu’au 4 septembre. Si Daniel Fauville exploite la valeur poétique du matériau en un imaginaire qui l’investit et le charge de ses réminiscences, Florence Freson se fonde davantage sur le principe de résistance pour lui dicter une structure davantage qu’une forme. À leur côté, on retrouve Stéphane Gille, Monica et Bernard Hubot sans oublier Marc Feulien.

Il y a dix ans, l’Atelier 340 avait lancé la notion de surface sculpturale. Pour commémorer cet anniversaire, le musée-galerie a reposé les mêmes questions afin de saisir une évolution dans la relation que le sculpteur, amené à penser la matière, pouvait entretenir avec son "effet de surface". Le résultat, visible jusqu’au 16 octobre : une exposition réunissant Bernd Lohaus, Florence Freson, Jef Mouton, Johan, Parmentier, Christian Claus, Wodek, Jean-Philippe Lecharlier, Anne-Marie Kleenes et Marco Dessardo. Des pièces remarquables qui témoignent d’une sensibilité mouvante, qui va de la profondeur à la surface pour exprimer la matière dans son existence même. Mais y a-t-il véritablement eu une évolution depuis le constat de 1984 ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°6 du 1 septembre 1994, avec le titre suivant : Belgique : D’une fin d’été aux promesses de rentrée

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