Genève

Un musée pour la Suisse Romande

Après de nombreux atermoiements, le Musée d’art contemporain s’ouvre enfin

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 1 septembre 1994 - 659 mots

Prévu de longue date, le Musée d’art moderne et contemporain (Mamco) s’ouvrira finalement le 22 septembre, et devrait pouvoir, dans l’esprit de ses promoteurs, rivaliser avec les institutions des villes alémaniques comme Bâle, Berne et Zurich. Il sera animé par Christian Bernard, jusque-là directeur de la Villa Arson à Nice.

GENÈVE - Si une association pour un Musée d’art moderne (Amam) existe depuis exactement vingt ans à Genève, ses efforts étaient jusqu’à présent restés vains. En dehors de quelques expositions, de 1976 à 1980, et d’un embryon de collection, qui compte actuellement moins d’une centaine d’œuvres, elle n’avait pu dénouer une situation politique locale assez complexe qui empêchait de concrétiser le projet d’un véritable musée.

La création de la Fondation Mamco voilà trois ans, regroupant sept hommes d’affaires, membres donateurs, et présidée par Philippe Nordmann, a finalement permis de transformer le rêve en réalité. La Fondation aura la charge d’administrer le musée. Compte tenu de la subvention minime accordée par la Ville, elle devra trouver par elle-même les ressources nécessaires au développement du musée et en assurer l’équilibre financier.

La principale contribution de la Ville de Genève a été d’acquérir en 1991 un bâtiment industriel désaffecté proche de la plaine de Plainpalais, où a d’abord été installé le Centre d’art contemporain, dont s’occupe activement Paolo Colombo. Déployées sur quatre étages qui totalisent plus de 3 500 mètres carrés, les salles du futur musée ont subi jusqu’à la fin de l’été un simple lifting et une mise aux normes, sans même le secours d’un architecte.

La modestie du budget d’aménagement (environ 8 millions de francs français) ne permettait pas d’envisager des transformations plus lourdes qui, pour son directeur Christian Bernard, étaient de toute façon superflues, vu l’état relativement satisfaisant du bâtiment. Pas question, donc, de jouer sur une quelconque séduction de l’architecture pour attirer le public.

À la recherche d’une collection
La conception du musée n’en est pas moins originale, puisque des "cabanes", portant le nom d’un donateur, viendront en interrompre de temps à autre la continuité, et que des salles entières seront confiées à un artiste, comme Martin Kippenberger, qui en gérera lui-même l’accrochage évolutif.

Deux espaces singuliers seront en outre aménagés : l’un permettra la reconstitution de l’appartement de l’agent parisien Ghislain Mollet-Viéville, épris depuis de longues années d’art minimal et conceptuel, l’autre abritera un atelier de Sarkis. Le cabinet des dessins, au quatrième étage, sera inauguré par une exposition Tony Smith, à laquelle succédera plus tard une exposition Claudio Parmiggiani.

Si le budget annuel de fonctionnement du musée est connu (de 6 à 8 millions de francs français), on ne sait encore comment la collection pourra s’enrichir. Pour l’heure, hormis le noyau constitué par l’Amam, Christian Bernard compte avant tout sur des prêts de longue durée (de la part d’artistes, de collectionneurs ou d’institutions) et d’éventuelles donations, que sa complicité avec un certain nombre d’artistes devrait favoriser.

Dix-sept sculptures de Royden Rabinowitch seront ainsi prêtées au Mamco pour une durée indéterminée. Des artistes comme Claude Rutault, Michel Verjux, Felice Varini, Maurizio Nanucci, Maria Nordman ou Philippe Thomas contribueront eux aussi, à des degrés divers, à rendre le musée vivant.

"Un idéal du musée"
"S’il n’y a pas de musée idéal, dit Christian Bernard, il y a cependant un idéal du musée qui est d’offrir un site concret à la réalité physique des œuvres d’art, et de créer les conditions objectives de leurs meilleures visibilité et intelligibilité possibles, à l’ère de leur reproduction généralisée."

L’ambition clairement affichée est donc de donner au musée une dimension expérimentale, en associant toujours plus étroitement les artistes et le public par des procédures originales. La nature de l’art des trente-cinq dernières années, auquel le Mamco se voue, devrait pouvoir s’y prêter. L’interactivité est, pour l’équipe du musée, à l’ordre du jour, même si on ne distingue pas encore clairement ce qu’elle peut recouvrir dans un lieu dont la vocation traditionnelle est de conserver.

Musée d’art moderne et contemporain, 10, rue des Vieux Grenadiers, Genève.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°6 du 1 septembre 1994, avec le titre suivant : Un musée pour la Suisse Romande

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque