Madrid

L’Espagne et le Surréalisme : une contribution spectaculaire

L’événement de l’automne artistique espagnol

Le Journal des Arts

Le 1 octobre 1994 - 663 mots

Deux cents œuvres pour une exposition itinérante sur les développements espagnols du mouvement surréaliste, de l’apparition jusqu’à la dispersion, après 1936, sur fond de guerre civile.

Madrid - L’exposition "Le Surréa­lisme en Espagne" regroupe deux cents œuvres – peintures, sculptures, objets, dessins, collages et photomontages – réparties en huit sections. On part de Picasso, Miró et Dali pour établir d’emblée l’importance de la contribution espagnole au Surréalisme européen, puis l’on suit un itinéraire géographique. À Madrid, on trouve deux des groupes les plus actifs du mouvement : celui de la Residencia de Estudiantes, qui hébergea un temps Dali, Garcia Lorca et Buñuel ; celui du "Surrealismo tellurico", mené par Benjamin Palencia et par Maruja Mallo.

L’itinéraire se poursuit avec la Catalogne où le Surréalisme a connu un grand succès, culminant avec l’Exposicion Logicolorista de mai 1936, la plus importante présentation collective de ce mouvement jamais organisée en Espagne. La section suivante, intitulée "Autour de la main coupée", offre un panorama du mouvement aragonais caractérisé par la présence des frères Luis et Alfonso Buñuel, à qui l’on doit la diffusion des collages de Max Ernst en Espagne. Dans la section consacrée à Ténérife, l’île d’Oscar Dominguez, on a voulu recréer le climat intellectuel et artistique de l’Exposicion Internacional del Surrealismo de mai 1935, à laquelle participèrent Breton et Péret.

La présentation continue avec les témoignages sur "L’onde de choc du Surréalisme", pour s’achever avec les chapitres les plus délicats de l’histoire de ce mouvement : c’est "L’heure de vérité", qui présente les œuvres réalisées pendant et après la guerre civile. La section intitulée "Le Surréalisme de la diaspora" rassemble les œuvres des artistes exilés à Porto Rico, en Argentine, aux États-Unis et surtout au Mexique, où s’établirent alors Buñuel, Remedios Varo, Rodriguez Luna, Texidor et bien d’autres. Voici comment les responsables de l’exposition, Lucia Garcia de Carpi, professeur d’art contemporain à l’université de Madrid, et Josefina Alix, critique d’art, présentent sa genèse et ses objectifs.

Comment est née l’idée de cette exposition ?
"De la nécessité de réexaminer notre passé et les conséquences de la guerre civile : des années d’oubli ont fait que l’art moderne espagnol – et surtout celui des mouvements d’avant-garde – n’est pas encore connu dans toute son étendue. Rappelons ici que les années vingt et trente avaient été marquées, pour l’Espagne, par une renaissance artistique sans précédent : la guerre civile et ses conséquences, l’exil des meilleurs artistes et intellectuels ont tué ces promesses. Le public continue d’ignorer des artistes capitaux dans le domaine des arts plastiques, alors même que l’on retrouve toujours des œuvres que l’on croyait disparues du patrimoine. Notre exposition est, de ce point de vue, une réhabilitation de ce patrimoine."

Quels sont vos objectifs ?
"D’un côté, montrer l’importance du Surréalisme dans l’art espagnol des années trente ; de l’autre, démontrer que la contribution des artistes espagnols a été vitale dans le développement international du mouvement. Sans Picasso, Miró et Dali, il serait impossible de parler du Surréalisme tel qu’il s’est constitué durant ces années-là. Nous avons privilégié la qualité des œuvres. Pour Picasso, Miró et Dali, nous avons choisi celles qui ont influencé de manière décisive les artistes qui travaillaient alors en Espagne."

Quelles sont donc, selon vous, les caractéristiques particulières du Surréalisme espagnol ?
"Il faut souligner en premier lieu la rapidité extrême de sa diffusion dans notre pays, avec une influence supérieure à celle que le mouvement a connue dans d’autres pays européens. Ensuite, la contribution espagnole au mouvement de Breton est spectaculaire, non seulement par le nombre des artistes qui s’y identifièrent, mais aussi par l’importance prépondérante de certains – comme Picasso, Miró, Buñuel, Dali ou Dominguez – à l’intérieur du mouvement international. On pourrait ajouter l’attraction pour le "tellurique", l’insistance sur la décomposition de la matière et l’omniprésence d’un sentiment de lutte et de souffrance."

\"El Surrealismo en España\"

Madrid, Centro de Arte Reina Sofia, 18 octobre 1994-9 janvier 1995. Puis Kunsthalle de Düsseldorf, 11 février-17 avril 1995, Vienne, mai-juin 1995, Vérone, juillet-octobre 1995.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°7 du 1 octobre 1994, avec le titre suivant : L’Espagne et le Surréalisme : une contribution spectaculaire

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