La Biennale de Venise 1995

L’avenir des pavillons

Divergences entre la municipalité de Venise et les pays étrangers

Le Journal des Arts

Le 1 décembre 1994 - 848 mots

Sur le plan des principes, la Biennale et la municipalité de Venise se déclarent d’accord pour ouvrir les espaces d’exposition des \"Giardini\" toute l’année, avec des activités permanentes et non simplement saisonnières. Mais les divergences commencent avec la mise en pratique.

VENISE - Gian Luigi Rondo, président de la Biennale, insiste sur "l’autonomie réciproque" des instances concernées et appelle de ses vœux la création d’un organisme juridique qui unirait les pays propriétaires des pavillons, la Biennale et la municipalité pour une planification des activités culturelles. Mais ce sont précisément les pays étrangers – dont les représentants ont été convoqués les 11 et 12 novembre à Venise par la Biennale – qui soulèvent le plus d’opposition contre ce projet ; les objections portent sur la méthode, l’organisation, le contenu et le budget.

Comme l’a clairement énoncé l’assesseur Gianfranco Mossetto, la municipalité a l’intention de subordonner le renouvellement des conventions pour l’usage des Giardini à un engagement des pays étrangers en faveur d’activités permanentes. Le représentant de l’Australie a élevé contre cette prétention la protestation la plus véhémente, car si la municipalité est disposée à assumer les dépenses courantes d’entretien, la charge de la transformation des pavillons reviendrait aux pays propriétaires.

En matière d’organisation, les procédures et la répartition des compétences entre Biennale et municipalité sont loin d’être claires, comme l’a déploré le représentant du Royaume-Uni. Pour ce qui est du contenu, le même représentant a proposé de constituer un comité permanent auquel participeraient les pays étrangers dans le cadre d’un programme d’activités culturelles. La France, soutenue par le Canada, a fait observer que l’ouverture des Giardini changera la nature du rapport entre les pays étrangers et la Biennale. L’Allemagne a été claire, il n’y a pas assez d’argent pour faire face à toutes les demandes, et Venise n’est pas seule au monde.

Arts plastiques et architecture
La mauvaise humeur des pays étrangers est apparue aussi sur un autre point : le fait de devoir programmer à la fois, pour la même échéance du 11 juin 1995, la XLVIe Exposition internationale d’art et la VIe Exposition internationale d’architecture. Les problèmes touchent à la fois au financement, à l’organisation (le commissaire choisi pour les arts plastiques n’est pas toujours compétent en matière d’architecture), au moment (le délai n’est que de quelques mois) et à l’espace.

À ce propos, les États-Unis, appuyés par d’autres pays, ont nettement déclaré leur opposition à toute construction d’un édifice, même provisoire, dans l’exèdre, pratiquement devant leur pavillon : cela compromettrait radicalement l’aménagement de l’exposition de Bill Viola, fondée sur le rapport intérieur/extérieur.

La prochaine édition de la Biennale a commencé de prendre tournure : l’espace pour l’architecture sera bien la Corderie, où seront présentés les grands maîtres et les jeunes promesses. Le thème proposé par le directeur Hans Hollein est celui des "Limites", de l’architecture dans le champ des arts visuels, de la musique, du cinéma et du stylisme.

Seront en outre réalisés des parcours architecturaux qui, à partir des différents points d’accès à la Sérénissime (aéroport, piazzale Roma et gare), mèneront jusqu’aux Giardini. Jean Clair a lancé son programme d’arts visuels. L’exposition historique – de 1895 à 1968 – se tiendra au Palazzo Grassi. On prévoit environ 450 œuvres, parmi lesquelles des Matisse, Giacometti, De Chirico et Picasso. Les prêts ont été accordés par le Musée d’Orsay à Paris, le Metropolitan Museum et le MoMA de New York, la Tate Gallery de Londres et la Fondation Thyssen de Madrid.

Le pavillon de l’Italie présentera des œuvres groupées autour du thème "Identité et altérité", de 1968 à nos jours, et réparties en deux sections. La première, confiée à Cathrin Pichler, sera centrée sur le vidéoart ; la seconde, sous la responsabilité d’Adalgisa Lugli, sera consacrée à l’Arte povera et à son influence dans l’art contemporain. La commission – Belli, Belting, Calvesi, Dorfles et Macchi – est chargée de la sélection des quinze artistes italiens.

L'exposition historique
D’autres initiatives et manifestations parallèles sont également prévues. L’une des plus importantes sera l’exposition historique au palais des Doges, intitulée "La Biennale de Venise" et consacrée aux rapports désormais centenaires entre la cité et l’exposition. Elle est confiée à Giandomenico Romanelli et à un comité scientifique dont font partie Jean Clair et Gabriella Belli. Une autre exposition – "Cent ans de portraits de la collection Alinari-Florence " – devrait se tenir à la Fondation Cini.

Les 9 et 10 juin 1995, en même temps que les inaugurations, aura lieu un symposium réunissant les prix Nobel de la paix et des sciences sur le thème "Identité et altérité" : 1995 marque aussi le centenaire de l’institution de ce prix.

Enfin, pour le mois de juillet, on songe à une initiative : "Comment enseigner l’art d’enseigner l’art ?" Les professeurs de l’Académie d’été de Salzbourg, fondée par Kokoschka, devraient venir donner des cours de peinture, de sculpture et de gravure. Telle est l’alternative proposée par Jean Clair à l’exposition "Aperto", qui est supprimée.

Outre les "Lions d’or", un prix "Deux mille" (de 25 millions de lires, soit 85 000 francs) sera décerné au meilleur artiste de moins de quarante ans, avec quatre mentions d’honneur.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°9 du 1 décembre 1994, avec le titre suivant : L’avenir des pavillons

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