Ariège - Une grotte en toc

L’Ariège ouvre un centre dédié à l’art pariétal

Le Journal des Arts

Le 1 mai 1995 - 755 mots

Le Parc pyrénéen de l’Art préhistorique, créé à Tarascon-sur-Ariège, a pour ambition de valoriser le patrimoine de sa région. Il se trouve à cinq kilomètres de la grotte. Le centre est bâti autour du Grand atelier, où s’intègre une reproduction du Grand salon noir de la grotte de Niaux. C’est le seul exemple au monde où l’on ait à la fois la grotte et sa reproduction. L’Atelier est complété par un parc de détente, qui offre aux visiteurs une introduction à l’art de la préhistoire.

TARASCON-SUR-ARIÈGE - Cent vingt personnes au maximum par jour peuvent visiter la grotte de Niaux, ouverte moyennant des conditions draconiennes de protection de l’environnement. Le Comité scientifique, présidé par Jean Clottes, conservateur général du Patrimoine, a donc voulu, grâce aux connaissances actuelles en préhistoire, proposer une reconstitution partielle de la grotte de Niaux.

Ce projet, Jean Loup Pivin et Bruno Airaud, du Bureau d’ingénierie culturelle, l’ont défini et mis en forme. Le parc, ouvert au public en avant-première le 30 juillet 1994, a accueilli 42 000 visiteurs payants. Ce succès a permis la création de nouveaux éléments d’informations. Le parc a ouvert officiellement depuis le 8 avril, et attend 80 000 visiteurs cette année.

Le Grand atelier
L’espace couvert du Grand atelier offre une scénographie spectaculaire, complétée par des éléments d’information nombreux tout au long d’un parcours qui mène le visiteur jusqu’au fac-similé. Celui-ci est équipé d’un casque infrarouge qui lui permet de découvrir, à son rythme, la coupe de l’ensemble de la grotte, les nombreux audiovisuels, le diaporama de vingt mètres de long qui illustre la diffusion des techniques artistiques dans l’espace et dans le temps.

L’art préhistorique apparaît à plus de 35 000 ans et dure 25 000 ans avant le présent. Les Magdaléniens ne vivaient pas en isolat. Pendant toute cette période, il y avait des contacts et des échanges, attestés par les objets retrouvés. L’art préhistorique a une certaine unité : des thèmes ont également été repris ; les signes claviformes de Niaux se retrouvent en Espagne.

Le fac-similé du Salon noir
Lascaux II, le premier fac-similé réalisé, a été conçu comme un décor conforme à la grotte de Lascaux, définitivement fermée. La reconstitution du Salon noir de la grotte de Niaux est plus sophistiquée. Pour la coque du fac-similé, on a utilisé, non pas le béton, mais des résines plastiques, ce qui permet une rigueur de restitution beaucoup plus grande.

Pour cela, le relevé stéréophotogrammétrique en trois dimensions des parois a permis au modeleur de restituer les effets de relief. Grâce à l’utilisation de la lumière ultra-violette, les travaux d’Alexandre Marshack en 1974 ont permis de voir des quantités de traits et de détails invisibles à l’œil nu dans les peintures du Salon noir.

La prise de vues des peintures et des gravures a été faite en lumière du jour, suivie, dans les mêmes conditions, d’une photographie en lumière ultra-violette. Les peintres modernes ont pu reconstituer des détails disparus et reproduire les marques du pelage aujourd’hui invisible dans la grotte, offrant au visiteur une reproduction des peintures telles qu’elles étaient à l’époque magdalénienne.

Deux années de travaux ont permis à Renaud Sanson et à son équipe de recréer le Salon noir. Cette restauration ne pourrait en aucun cas être réalisée sur les dessins originaux.

La visite de la grotte originale et la découverte du Salon noir rendent plus sensibles les quelques imperfections du fac-similé. L’émotion ressentie lorsque l’on découvre à la lumière des lampes l’incroyable beauté des dessins sur les parois – l’ébauche d’une ligne d’un cheval, l’admirable bouquetin pyrénéen, le ventre d’un cheval, la ligne d’un bison et ce personnage mystérieux au fond du cul-de four – est d’une autre nature et ne peut être recréée artificiellement.

Une certaine raideur dans la réalisation des peintures s’explique en partie par la lumière artificielle, par les peintures modernes utilisées pour recréer les pigments préhistoriques, et par les pinceaux des peintres modernes. La couleur de la roche reconstituée n’a pas la "patine" du temps.

Un parc de détente réalisé par des artistes complète le Grand atelier. L’itinéraire propose un Torrent des traces – celles des pas d’enfants relevés dans le réseau Clastres de Niaux –, un Panorama de la chasse, un Labyrinthe des sons. Péda­gogiquement, cet ensemble est une introduction à la grotte. Des fac-similés se feront ailleurs ; un projet est en cours d’élaboration à Altamira, en Espagne, et les techniques évolueront vers des reconstitutions virtuelles.

Parc pyrénéen de l’Art préhistorique, Route de Banat - Tarascon-sur-Ariège. Ouverture du 8 avril au 2 novembre, de 10h à 19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°14 du 1 mai 1995, avec le titre suivant : Ariège - Une grotte en toc

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