Palais de Westminster - Le mystère de la Chambre peinte

Deux prophètes manquent à l’appel

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1995 - 586 mots

Ce ne sont plus deux mais quatre panneaux, au moins, qui ont échappé à l’incendie de la Chambre peinte de l’ancien palais de Westminster, en 1834. Deux d’entre eux, récemment redécouverts dans un grenier de Bristol, ont été acquis par le British Museum (lire JdA n° 12, mars). On a perdu la trace des deux autres, mais leur existence est signalée dans un ouvrage datant de 1839. Ces panneaux datent de 1264 et sont les plus anciennes peintures à l’huile connues en Europe.

LONDRES - Après l’annonce de la découverte de Bristol, l’historien de l’art Alan Bird nous a signalé une note indiquant qu’il existait quatre panneaux, semblant correspondre à ceux de la Chambre peinte, dans la collection d’Adam Lee, ancien surveillant des travaux du palais de Westminster. Alan Bird a relevé cette note dans un essai de W.B. Sarsfield Taylor, datant de 1839, intitulé Naissance et essor de l’art britannique et publié en appendice à la traduction anglaise de L’Art de peindre de Mérimée. Adam Lee, indique la note, possédait "quatre très anciennes peintures sur bois (à mon avis, du noyer) ; l’une représentant un séraphin et les trois autres, les prophètes Isaïe, Jérémie et Jonas".

Bien que W.B. Sarsfield Taylor associe les panneaux au palais de Westminster, rien avant la découverte de Bristol n’évoquait particulièrement la Chambre peinte. Les panneaux découverts dans le grenier de Bristol représentant un séraphin (ou un ange) et un prophète non identifié, il est probable que les panneaux manquants représentent tous deux des prophètes.

Ils devraient avoir la même taille, soit environ 45 cm de côté, et, s’ils possèdent toujours le cadre doré dont les avait entourés Lee, ils portent sans doute le même type d’inscription indiquant "Ancienne peinture d’un prophète provenant du plafond de la vieille Chambre peinte et descendue lors des réparations de 1816".

Le texte de W.B. Sarsfield Taylor fournit également de précieuses indications sur l’état des quatre panneaux. Ils étaient, d’après lui, extrêmement bien conservés : "La peinture adhère solidement au support, écrit-il. Les couleurs, sans être vives, sont encore nettes et intactes, sauf aux endroits où le blanc de chaux a débordé. La technique utilisée semble être un mélange d’huile et de vernis."

Personne ne sait ce qui est advenu des panneaux après la mort d’Adam Lee, en 1843. Des recherches menées par Mireille Galinou, conservateur au musée de Londres, ont prouvé que certains des tableaux de Lee ont été transmis à son arrière-petite-fille.

La donation qu’elle fit au musée, en 1915, ne portait que sur les peintures d’architecture du palais de Westminster et ne concernait pas les panneaux. Il est donc tout à fait possible que les deux œuvres manquantes – exemplaires rarissimes des premières œuvres peintes à l’huile en Europe – subsistent quelque part, méconnues.

Le British Museum a acquis les deux panneaux retrouvés au marchand d’art Sam Fogg pour la somme de 500 000 livres (4,2 millions de francs), grâce à l’aide du National Heritage Memorial Fund, qui a fourni 400 000 livres (3,3 millions de francs), et à celle du National Art Collections Fund, qui a offert 25 000 livres (200 000 francs environ).

Après avoir été montrés au public le mois dernier, les panneaux seront de nouveau présentés, avec d’autres éléments provenant de la Chambre peinte, dans le cadre d’une exposition sur "Les rois médiévaux de Westminster", qui ouvrira ses portes le 26 octobre. Les historiens de l’art Paul Binski et Michael Liversidge préparent une étude complète sur la découverte de Bristol, à paraître prochainement dans le Burlington Magazine.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°14 du 1 mai 1995, avec le titre suivant : Palais de Westminster - Le mystère de la Chambre peinte

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