New York- Picasso et Matisse au sommet

Le Portrait d’Angel Fernandez de Sotto a atteint 134 millions de francs

Par Roger Bevan · Le Journal des Arts

Le 1 juin 1995 - 1040 mots

Les ventes d’art moderne et impressionniste à New York ont fourni des signes encourageants d’une reprise du marché. La présence d’une douzaine de chefs-d’œuvre d’une valeur considérable – plus qu’il n’en est apparu dans aucune série de ventes à New York ou à Londres ces six dernières années – représentait un véritable défi pour le marché.

NEW YORK  (de notre correspondant) - Chez Sotheby’s, les quarante-six toiles et sculptures du catalogue de la collection Donald et Jean Stralem ont toutes été vendues (sauf deux d’entre elles) dès le soir du lundi 8 mai, pour la somme exceptionnelle de 59,2 millions de dollars (environ 300 millions de francs). La vente des deux plus importantes toiles de la collection a été spectaculaire.

Le Portrait d’Angel Fernandez de Soto de la période bleue de Picasso (estimation officieuse de 7 à 10 millions de dollars), disputé par deux enchérisseurs au téléphone, a été vendu 26,5 millions de dollars (134 millions de francs), et La pose hindoue de Matisse a établi un nouveau record pour l’artiste en atteignant la somme de 14 852 500 dollars (75 millions de francs). Un autoportrait de Vuillard, représentant l’artiste jeune (estimé 200 000 à 300 000 dollars), a été acheté par le président de la TWA, Carl Icahn, pour 160 000 dollars (800 000 francs).

Mais un second portrait, une œuvre plus affirmée de la maturité, est monté jusqu’à 680 000 dollars (3,43 millions de francs), pour une estimation de 300 000 à 400 000 dollars. Le dernier des huit tableaux de Vuillard, un groupe de musiciens de la période nabie estimé 600 000 à 800 000 dollars, a constitué le clou de la soirée en obtenant la somme étonnante de 1,45 million de dollars (7,32 millions de francs).

Le lendemain, pour la seconde nocturne, David Nash, directeur de département, tenait le marteau à la place de Simon de Pury. Les ventes du catalogue Barry ont sans doute mis Sotheby’s dans l’embarras : trois des douze lots n’ont pas trouvé preneur, et les autres n’ont permis de recueillir que 7,14 millions de dollars (36 millions de francs).

Les prix les plus élevés ont été obtenus pour un paysage de Cézanne, La route (le mur d’enceinte), vendu 2,1 millions de dollars (10,6 millions de francs) pour une estimation de 2,5 à 3,5 millions de dollars, et par une Vue de l’église de Vernon, de Monet (estimée 2,5 à 3,5 millions de dollars), vendue 3,4 millions de dollars (17,2 millions de francs).

Le reste de la vente comprenait 57 lots, dont 43 ont trouvé acquéreur pour un total de 31,88 millions de dollars (161 millions de francs). Le catalogue incluait quinze tableaux et sculptures, dont certains d’importance – confiés par le marchand de Madison Avenue, Klaus Perls – apparemment présentés sans prix de réserve. L’œuvre la plus marquante, un portrait de Dora Maar, peint par Picasso en 1938 (estimé 2 à 3 millions de dollars), a atteint le prix le plus élevé, soit 2,8 millions de dollars (14,1 millions de francs). La société Nahmad a acquis pour 2,35 millions de dollars (11,9 millions de francs) une étude de Picasso, Femme accroupie au costume turc (Femmes d’Alger), estimée entre 3 et 4 millions de dollars.

Une tête de femme de Modigliani, en calcaire, estimée 1,5 à 2 millions de dollars, a été acquise par le marchand new-yorkais Peter Blum pour 950 000 dollars (4,8 millions de francs). Une œuvre surréaliste de Dali, Cygnes reflétant des éléphants (estimée 2,5 à 3,5 millions de dollars) a obtenu le prix le plus élevé de la vacation : un collectionneur privé européen l’a achetée 3,2 millions de dollars (16 millions de francs). Mais cette soirée a connu un désastre : l’échec de la vente du tableau de Toulouse-Lautrec, Au lit : le baiser, appartenant à l’ex-commissaire-priseur Maurice Rheims. Le sujet, une scène saphique, était difficile et l’estimation officieuse, de 4 à 5 millions de dollars, sans doute excessive.

Le mercredi 10 mai, Christie’s a vendu l’intégralité de la collection de soixante-seize toiles et sculptures provenant de la succession de Ralph et Georgia Colin. La vente a rapporté 34,97 millions de dollars (176,6 millions de francs). Meilleure enchère de la soirée et nouveau record pour Modigliani : son Nu assis au collier, estimé 7 à 10 millions de dollars, a été acheté pour 11,3 millions de dollars (57 millions de francs) sur enchère téléphonique.

Cinq enchérisseurs se sont disputés un Déjeuner de Vuillard. Estimé entre 600 000 et 800 000 dollars, il est parti à 1,4 million de dollars (7 millions de francs). Une aquarelle colorée de Paul Klee, estimée 300 000 à 400 000 dollars, a été acquise pour 650 000 dollars (3,3 millions de francs). Pièce de bœuf de Soutine, estimée 300 000 à 400 000 dollars, a été enlevée à 460 000 dollars (2,3 millions de francs) par un acheteur allemand.

Le lendemain, trente-quatre des quarante et un lots mis en vente par Christie’s ont été vendus pour un montant total de 53,3 millions de dollars (269,2 millions de francs). Le Jeune homme à la casquette, peint par Van Gogh à la fin de 1888, a atteint le prix le plus élevé de la soirée : 12 millions de dollars (60,6 millions de francs), pour une estimation officieuse de 7 à 9 millions de dollars. Les trois tableaux confiés par Pamela Harriman ont connu des fortunes diverses.

Le Picasso, un portrait néoclassique de sa femme Olga et de leur fils (estimé 9,5 à 12,5 millions de dollars), a été disputé au téléphone par deux enchérisseurs. L’un d’eux l’a finalement emporté pour la somme de 10,9 millions de dollars (55 millions de francs).

Le portrait de Mademoiselle Demarsy de Renoir (estimé 5 à 7 millions de dollars) a été acquis 5,1 millions de dollars (25,8 millions de francs) sur enchère téléphonique, tandis que la Femme au chapeau bleu de Matisse était achetée par la société Nahmad pour 1,02 million de dollars (5 millions de francs), alors que son estimation était comprise entre 2,5 et 3,5 millions de dollars. Parmi les autres toiles impressionnistes mises en vente, une splendide œuvre de jeunesse d’Auguste Renoir, La Mare aux Fées (estimé 1 à 1,5 million de dollars) a été adjugée 1,8 millions de dollars (9 millions de francs).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°15 du 1 juin 1995, avec le titre suivant : New York- Picasso et Matisse au sommet

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