Art ancien

Feux sur les chasses

Un décor versaillais à Amiens

Par Cécile Bouleau · Le Journal des Arts

Le 1 décembre 1995 - 455 mots

Réunies au Musée de Picardie depuis 1923, Les Chasses en pays étrangers (1735-1739) – décor de la Petite Galerie des appartements privés de Louis XV pour Versailles – demeurent peu connues. Restauré, étudié, cet ensemble de neuf toiles dues à six mains différentes – Boucher, De Troy, Lancret, Parrocel, Pater et Vanloo – fait date par sa nouveauté dans l’histoire de la peinture française. Pour l’occasion, l’exposition restitue le volume original des lieux, propose un historique du décor à travers les œuvres préparatoires et donne un aperçu du contexte en évoquant les grands peintres animaliers de l’époque.

AMIENS - Si certains de ces tableaux ont déjà été exposés de manière isolée, l’idée en revanche de présenter cet ensemble tel qu’il fut conçu est inédite et séduisante. Quoi de plus parlant en effet que de placer des œuvres en situation ? Jusqu’alors accrochées comme des tableaux de chevalet, elles font en réalité partie d’un tout qui a su conserver son unité – chose rare – au fil du temps. Les toiles, enchâssées dans leurs somptueuses bordures, se font face deux par deux.

Placées à hauteur d’homme (à 60 cm du sol), elles produisent ainsi pleinement leur effet, et le spectateur entre de plain-pied dans le feu de l’action, face aux ours, éléphants, autruches, taureaux, crocodiles, tigres et autres lions.

Les artistes, cependant, ne sont pas convaincants au même degré, et certains pâtissent de la comparaison avec les brillantes compositions de François Boucher ou de Carle Vanloo. Quelques-uns de ces animaux "exotiques", qui nous sont aujourd’hui si familiers, prêtent parfois à sourire, tel l’éléphant furieux et écumant de Charles Parrocel, ou l’espiègle crocodile de Boucher. Les proportions de la pièce, de même que les ébrasements des fenêtres et le coloris des lambris d’origine ont été respectés.

Cette reconstitution, qui ne sera malheureusement pas réitérée lors de la présentation à Versailles, est pré­cé­dée par des gravures – de Tempesta ou d’après Stradanus et Rubens –, sources dont ont pu s’inspirer ces peintres. Plusieurs belles Chasses de Joseph Parro­cel, pionnier en matière d’exotisme, figurent également en introduction. Sont aussi évoqués des artistes dont la représentation d’animaux en tous genres était la spécialité.

Ainsi apparaissent quelques-unes des très nombreuses études de François Desportes et de somptueuses toiles de Bachelier pour Choisy, notamment un époustouflant Lion d’Afrique combattu par des dogues. Enfin, esquisses et dessins pour la Petite Galerie viennent éclairer la genèse du projet, le tout documenté par un solide catalogue.

"VERSAILLES : LES CHASSES EXOTIQUES DE LOUIS XV", Amiens, Musée de Picardie, jusqu’au 14 janvier 1996, ouvert tous les jours sauf lundi, 10h-12h30 et 14h-18h, entrée : 20 F. Versailles, Musée national du Château, 15 février-12 mai 1996. Catalogue par Xavier Salmon, édité par la RMN, 192 p., 250 F.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°20 du 1 décembre 1995, avec le titre suivant : Feux sur les chasses

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