Le plein de Monet à Chicago

Un million de visiteurs et 5 millions de dollars de bénéfices

Le Journal des Arts

Le 1 février 1996 - 488 mots

Près d’un million de personnes ont vu la grande rétrospective Monet qui s’est tenue à l’automne à l’Art Institute de Chicago. Avec des retombées économiques pour la ville estimées à 400 millions de dollars, l’Art Institute peut légitimement se réjouir de son succès. Mais à quel prix ? En dépit de la grande qualité de l’exposition, le plaisir de sa visite a été largement occulté par l’affluence des visiteurs.

CHICAGO - Une visite à l’exposition Monet offrait le triste spectacle d’une foule compacte de curieux et d’amateurs d’art jouant des coudes pour tenter d’apercevoir quelques œuvres. Dès lors, beaucoup d’entre eux ont le sentiment d’avoir été abusés, et de très nombreux commentaires écrits témoignent de leur déception. Pratique : "J’ai passé plus de temps à me soucier de ne heurter personne qu’à regarder les peintures", poétique : "Je n’ai pu voir les arbres au milieu de cette forêt humaine", ou encore sarcastique : "Essayez donc d’entasser 10 000 personnes de plus !"...

Mais est-il acceptable que des musées présentent des œuvres d’art dans de telles conditions, et Monet méritait-il un tel traite­ment ? Il est vrai que le montage de l’exposition avait coûté fort cher : près de 4,6 millions de dollars (23 millions de francs, soit légèrement plus que la rétrospective Cézanne au Grand Palais). Mais l’Art Institute, qui est une institution à but non lucratif, a tout de même réalisé un bénéfice de 5 millions de dollars (environ 25 millions de francs), une fois couverts les coûts de l’exposition, en partie grâce à la société Ameritech, qui a apporté un million de dollars.

Des exigences contradictoires
"Toutefois, les recettes ne sont pas prioritaires. Il y a des limites imposées par la sécurité, et d’autres liées au respect des exigences esthétiques. Nous nous efforçons de parvenir à un juste équilibre pour rendre l’exposition accessible au plus grand nombre, tout en faisant en sorte qu’elle demeure significative pour tous", affirme Larry Ter-Molen, responsable du développement, qui concède : "On ne parvient cependant jamais à répondre à toutes les exigences."

Devant l’immense succès de la rétrospective, on peut se demander pourquoi l’Art Institute n’a pas prolongé l’exposition ou élargi les horaires de visite. Des objections auxquelles James Wood, son directeur, répond en ces termes : "Je ne pouvais pas prolonger l’exposition. Les cent cinquante-neuf toiles exposées ont été prêtées par une centaine d’institutions, dans lesquelles elles tiennent une place essentielle. En outre, si l’on augmente le nombre d’heures d’ouverture par jour, il arrive un moment où l’on ne dispose plus de suffisamment de personnel, et la crédibilité du musée est alors engagée."

Les block-busters (expositions à succès) américains

"Monet" (Chicago Art Institute, Chicago, 1995), 965 000 visiteurs en 19 semaines, 159 œuvres sur 1 840 m2.
"Matisse" (MoMA, New York, 1992-1993), 950 000 visiteurs en 17 semaines, 400 œuvres sur 3 220 m2.
"Picasso" (MoMA, New York, 1990), 1,1 million de visiteurs en 18 semaines, 1 000 œuvres sur 2 760 m2.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°22 du 1 février 1996, avec le titre suivant : Le plein de Monet à Chicago

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