Architecture

Tetrarc à Nantes

L’île aux trésors

Par Gilles de Bure · Le Journal des Arts

Le 5 janvier 2010 - 438 mots

Qu’advint-il de l’île Beaulieu, de son entrelacs de bassins, de canaux, de docks, de quais, d’entrepôts, d’ateliers, lorsque les chantiers navals de Nantes fermèrent en 1987 ? Une vaste friche industrielle, un gigantesque terrain délaissé ancré entre deux rives sur la Loire. Jusqu’à ce que Jean-Marc Ayrault, député et maire (PS) de Nantes, subtilement conseillé par Jean Blaise, ne décide de la tirer de son sommeil et de la rebaptiser « île de Nantes ».

Sous la baguette de l’architecte-urbaniste-paysagiste Alexandre Chemetoff, nommé architecte en chef du projet de rénovation urbaine, un grand chantier de réhabilitation-reconversion du patrimoine industriel (Grues Titan, Blockhaus DY10, Hangar à bananes, Machines de l’île) s’est doublé du jaillissement d’architectures contemporaines, parmi lesquelles le palais de justice signé Jean Nouvel, des logements conçus par Christian de Portzamparc, l’école d’architecture imaginée par Lacaton & Vassal. S’y greffent des interventions d’artistes, tels les dix-huit Anneaux bordant le quai des Antilles, installation pérenne signée Daniel Buren avec la collaboration de Patrick Bouchain.

Dernière née de ces architectures, le siège du groupe Coupechoux (aménagement d’espaces, architecture intérieure, design), un immeuble carré dont les six étages (pour une surface d’un total de 3 600 m2) sont drapés dans une étrange cape, une sorte de côte de mailles faite de lames d’acier dont la conception revient au groupe d’architectes nantais Tetrarc (Michel Bertreux, Alain Boeffard, Claude Jolly et Jean-Pierre Macé).

De Tetrarc, on connaît d’autres architectures tout aussi ludiques et poétiques : l’immeuble EXTG, situé place de Bretagne à Nantes, où se met en place une stratégie du millefeuille ; le chapiteau itinérant Aux arbres citoyens, créé pour la Ville de Nantes et qui revisite avec humour et panache la tradition druidique ; ou encore une station de tramway à Hérouville-Saint-Clair (Calvados), sorte de long et désirable insecte monté sur de hautes pattes.

Avec cette nouvelle architecture baptisée « Manny », en hommage au mammouth du film d’animation L’Âge de glace (2002), les architectes de Tetrarc témoignent une fois encore de leur maîtrise d’un vocabulaire organique, biomorphique, et de leur vision de l’architecture en tant qu’œuvre d’art totale (à noter, que dans le cadre de l’opération « Estuaire » et à l’initiative de Coupechoux, deux artistes, Angela Bulloch et Rolf Julius, ont été conviés à dialoguer avec « Manny »).

Avec ce « nid d’acier », qui dissimule sous sa peau vibratile et son apparente démesure un immeuble performant, rigoureux, technique, « intelligent » et économe, les architectes de Tetrarc ont atteint leur but, celui de privilégier « la légèreté plutôt que la masse, l’ascendant plutôt que le statique, le vaporeux plutôt que le compact, la courbe sensuelle plutôt que l’arrête vive ».

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°316 du 8 janvier 2010, avec le titre suivant : Tetrarc à Nantes

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque